Une offre linguistique doit tenir compte de la diversité des publics et des traditions des pays d’accueil
L’enseignement des langues et de la culture d’origine constitue une demande ancienne et continue des populations marocaines émigrées. Que ce soit pour la langue arabe ou amazighe qui représente une demande émergente.
Pour des centaines de milliers de familles, cet enseignement est perçu comme le vecteur central du lien avec la terre d’origine et son patrimoine religieux et culturel.
Pendant deux jours, les participants et intervenants marocains et étrangers (Europe, Etats-Unis, Canada) à la première rencontre scientifique « Langues en immigration, de ses mutations et de ses nouveaux en enjeux », organisée à Rabat par le Conseil Consultatif des Marocains à l’Etranger (CCME), ont ainsi débattu de cette problématique dans toute sa complexité humaine et pratique, ainsi que dans ses nouvelles perspectives.
La comparaison entre la situation dans différentes pays montre de grandes disparités. A titre d’exemple, entre la France qui concentre le plus gros des effectifs et des moyens des projets (Ndlr le programme ELCO organisé en partenariat entre le Maroc et certains pays d’accueil), la Hollande qui y a mis un terme depuis 2004, la Belgique qui a mis en place un dispositif élaboré d’accompagnement et l’Espagne, où l’action est récente et décentralisée.
Les intervenants ont, par ailleurs, insisté sur le paradoxe qui existe entre d’un côté l’importance que ces programmes revêtent pour les populations d’origine marocaine pour des raisons culturelles, religieuses et de souci de préserver la transmission des patrimoines et des identités, et les limites, les insuffisances pédagogiques et les dysfonctionnements, malgré les moyens et les efforts consentis.
L’émergence de l’action des associations civiles des initiatives privées a aussi pris une grande part de l’intérêt des participants. Ces initiatives se partagent entre des enseignements dans les mosquées, des enseignements organisés par des acteurs associatifs bénévoles ou non, et la création de projets de véritables écoles structurées pour répondre à une demande qui va en s’amplifiant.
Mais dans le même temps, l’accélération et l’amplification de ces initiatives soulèvent au moins trois types de questions relatives à la qualité des enseignements et des apprentissages, la compétence des enseignements et enfin les orientations et les contenus des curricula.
Pour les enfants nés dans l’immigration, il ne peut y avoir d’insertion heureuse dans la société où ils vivent qu’en réussissant un bon parcours scolaire et professionnel, mais aussi en entreprenant un rapport positif et apaisé à toutes leurs filiations et appartenances.
Par la restauration et la revivification du lien et d’une identité ouverte, la langue et la culture peuvent non seulement aider les individus à se situer dans leurs cheminements singuliers mais aussi, sur le plan collectif, contribuer à une réhabilitation de l’origine et à une révélation de ce qui est universel en elle.
L’émergence de nouvelles générations constitue de toute évidence l’enjeu principal des décennies à venir. Le défi est bien celui de penser une offre linguistique et culturelle qui tienne compte à la fois de la diversité des publics, de la variété des contextes et des traditions nationales de pays qui sont désormais aussi les leurs.