Un collectif appelle les autorités algériennes à cesser la répression
Dans une Déclaration, ces militants et organisations des droits de l’Homme ont réitéré leur demande pour la « libération inconditionnelle » de l’ensemble des détenus d’opinion, journalistes, défenseurs des droits humains et avocats qui se trouvent en prison.
« 73 ans après l’adoption de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et 59 ans après l’accession de notre pays à l’indépendance, les libertés les plus élémentaires consacrées par la Déclaration sont vidées de leur substance par la législation et les pratiques », constatent les signataires de ce document.
Les auteurs de la déclaration ont dénoncé un sombre tableau de la situation des droits humains en Algérie qui baigne dans un « climat de répression et de restrictions des droits fondamentaux des Algériens et Algériennes ».
« Après des mois d’une mobilisation populaire pacifique, d’un Hirak qui a suscité un grand espoir pour établir un Etat de droit démocratique garantissant les droits de l’Homme, l’action des autorités se caractérise par une volonté affichée d’étouffer tous les espaces civiques autonomes et de criminaliser l’action politique des voix critiques », ont-ils fait remarquer, en rappelant que plus de 270 personnes se trouvent en détention pour avoir exercé les libertés fondamentales protégées par la Constitution.
S’il fallait une preuve supplémentaire de la volonté du pouvoir d’étouffer les libertés, les signataires de la déclaration la voient dans « l’interdiction de fait » de toute manifestation publique en violation de la Constitution de novembre 2020 qui garantit la liberté de manifestation pacifique sur simple déclaration.
« Toute tentative d’exercer la liberté de manifestation pacifique mène aujourd’hui à des poursuites pénales pour attroupement », a regretté encore le texte, qui déplore, par ailleurs, la fragilité de la liberté d’association, caractérisée par la dissolution d’associations, les menaces qui pèsent sur certains partis politiques d’opposition et le harcèlement de militants politiques.
« Ces mesures apparaissent comme un signal fort de dissuasion à destination des organisations gênantes pour le pouvoir », estiment les auteurs du document.
Pour eux, la situation de la liberté de la presse n’est pas plus reluisante : elle est même encore plus fragile en raison du « contournement de l’interdiction constitutionnelle de la privation de liberté pour les délits de presse » et des moyens de pression exercés sur les médias notamment à travers « les contrôles fiscaux et la sélectivité politique de l’accès à la publicité publique ».
Ils se sont de même déclarés « inquiets » quant aux répercussions de l’élargissement de la définition du crime de terrorisme.
« Désormais, revendiquer un changement de régime par des moyens non prévus par la Constitution -mais qui ne lui sont pas nécessairement contraires ou violents- peut entrer dans la définition du crime de terrorisme », explique la Déclaration qui dénonce la large instrumentalisation de l’accusation à des fins politiques.
Elle relève qu’ »un simple soupçon d’appartenance à une organisation classée terroriste par les autorités selon des critères obscurs suffit pour engager poursuites pénales », ajoutant que les arrestations pour terrorisme se multiplient à travers le pays dans le cadre d’opérations qui ressemblent fort à de l’intimidation par leur mise en scène, notamment dans plusieurs villages de Kabylie.
Elle a mis en garde, par ailleurs, contre le caractère « liberticide » du décret fixant les modalités d’inscription et de radiation de la liste nationale des personnes et entités terroristes et des effets qui en découlent.
Ce texte « ouvre la voie à l’arbitraire (…) il permet l’inscription sur la liste terroriste de personnes qui n’ont pas été condamnées judiciairement au mépris de la présomption d’innocence et du droit à l’honneur, tous deux censés être protégés par la Constitution », dénonce la déclaration, en réprouvant un dispositif attentatoire aux droits des personnes inscrites sur cette liste qui peuvent être privées de leurs biens et de tout moyen de subsistance.
« Il s’agit là d’une technique de mise à mort sociale particulièrement dissuasive et d’autant plus dangereuse que la définition du terrorisme est extrêmement large », estiment les signataires de la déclaration, qui appellent au strict respect des libertés garanties par la Constitution.