RSF interpelle John Kerry sur la situation de la liberté d’information en Algérie
L’organisation de défense de la liberté de presse Reporters sans frontières (RSF) a adressé une lettre au secrétaire d’Etat américain John Kerry dans laquelle elle lui fait part de ses préoccupations quant à la situation de la liberté d’information en Algérie.
"A l’approche de l’élection présidentielle du 17 avril prochain, l’organisation a recensé un certain nombre d’interpellations de journalistes en marge des manifestations organisées en protestation à l’annonce de la volonté d’Abdelaziz Bouteflika de briguer un quatrième mandat", note l’organisation, soulignant qu’"il est plus qu’urgent que les autorités algériennes réforment en profondeur le secteur des médias en optant pour un véritable pluralisme de l’information, tant au niveau de la presse écrite que de l’audiovisuel".
Les autorités algériennes, poursuit RSF, "se doivent de respecter leurs engagements constitutionnels et internationaux en matière de libertés fondamentales, notamment pour ce qui est de la liberté de l’information".
L’organisation écrit en outre que des journalistes couvrant les manifestations ayant suivi l’annonce de la candidature d’Abdelaziz Bouteflika pour un quatrième mandat ont "très souvent été pris pour cibles par les forces de l’ordre", relevant que ces attaques s’inscrivent en porte à faux avec la résolution, adoptée le 28 mars 2014, par le Conseil des droits de l’homme des Nations unies qui consacre l’importance du rôle des journalistes dans la couverture des manifestations et la nécessité pour les Etats de leur apporter la protection nécessaire.
Evoquant les cas de plusieurs journalistes algériens interpellés par les forces de l’ordre pour le seul motif d’informer l’opinion publique, RSF indique que les correspondants de la presse étrangère ne sont pas épargnés et que depuis mi-mars, le ministère de la Communication leur impose de prévenir ledit ministère de tout déplacement à l’extérieur de la wilaya d’Alger.
Pour RSF, "la situation de la presse, et plus généralement des médias et de la liberté d’expression, est loin d’être mesurable à l’aune du nombre de titres". Elle signale à cet effet que plusieurs publications émanent directement d’hommes d’affaires liés aux intérêts de l’Etat et des services de renseignement.
Quant à l’audiovisuel, l’organisation précise qu’une nouvelle loi, adoptée le 20 janvier 2014, devant mettre fin au monopole public et qui ne devrait entrer en vigueur qu’après le scrutin du 17 avril prochain, impose aux futures chaînes de télévision privées d’être thématiques et de limiter la durée de leurs émissions d’information.
Et de souligner que le manque d’indépendance de l’autorité de régulation de l’audiovisuel (ARAV) qui devrait être mise en place, "est source d’inquiétudes" dans la mesure où ses neuf membres sont nommés par décret présidentiel et cinq d’entre eux seront désignés par le président de la République lui-même.
"La campagne électorale est donc couverte par les quatre chaînes d’Etat, et certaines chaînes de droit étranger à la solde des services", fait remarquer RSF, notant que les nouvelles chaînes à capitaux privés sont la propriété de puissants hommes d’affaires, proches des milieux politiques et des forces armées.