Le Maghreb désuni sur la crise syrienne
A cause des dissensions stratégiques et structurelles entrez ses membre, personne n’attendait à ce que les composantes de l’espace maghrébin puissent avoir une approche similaire des grandes crises régionales encore moins une politique étrangère commune. Mais la récente polémique qu’à provoquée le refoulement par l’Algérie de réfugiés syriens vers le Maroc met en lumière la différence d’approche entre le royaume et l’Algérie d’une des plus insolubles crises arabes. La grande dispute sur le pouvoir à Damas entre un régime autoritaire qui s’accroche par la force et une opposition qui veut l’en déloger par les armes.
Le Maroc a officiellement dénoncé cette attitude par voie de communiqué. "Les autorités marocaines ont relevé la multiplication ces derniers temps des opérations de refoulement de réfugiés syriens (comme les subsahariens par le passé) par les autorités algériennes vers le territoire marocain à travers les frontières Est du Royaume", a déploré le ministère marocain de l’Intérieur, précisant que "pour la seule période allant du 26 au 28 janvier 2014, les autorités algériennes ont refoulé 77 ressortissants syriens, dont 18 femmes et 43 enfants (certains sont âgés de moins de deux mois)".
En fait l’attitude de l’Algérie ne surprend personne. La position des trois pays du Maghreb (Algérie, Maroc, Tunisie) à l’égard de cette crise est fondamentalement différente. L’Algérie a, depuis le début de ce conflit syrien, il y a trois ans, toujours conservé sa sympathie à l’égard du régime syrien et une attraction particulière pour le président Bachar al Assad. À l’époque l’explication du comportement algérien était fondée sur deux éléments importants. Le premier serait que l’Algérie qui avait connu une longue guerre civile, les années de braises disait-on à l’époque, a déjà goûté aux dégâts des groupes armées qui veulent rendre le pouvoir par la force. Le second élément de cette sympathie ouverte et constante du régime d’Abdelaziz Bouteflika à l’égard de Bachar al Assad provient de ce cousinage naturel entre régimes militaires et autoritaires construit autour d’une architecture soviétique du pouvoir que sont la république "démocratique et populaire" algérienne et le pouvoir baasiste syrien. Les deux sont dotés de la même structure clanique qui s’accroche au pouvoir et qui réprime dans le sang toute contestation.
Résultat de cette posture algérienne, Alger verrouillera non seulement ses portes aux opposants au régime syrien qui s’aventurent sur son territoire mais traitera avec une rare humiliation les réfugiés syriens qui osent s’incruster chez elle comme en témoigne les nombreux témoignages recueillis pars les associations humanitaires et de des droits de l’homme marocaines actives aux frontières entre le Maroc et l’Algérie. Cette politique de fermeture s’accompagnera par une action remarquée sur la scène internationale. Alger a brillé par son absence sur des théâtres où l’opposition syrienne avait besoin d’aides et de soutiens politiques.
Le Maroc quant à lui à depuis le début du conflit pris la mesure de la crise de pouvoir qui déchire la Syrie. Et dès le début, sa diplomatie s’est inscrite dans la dynamique internationale pour trouver une issue politique à cette grande blessure syrienne. Son objectif comme ceux qui s’intéressent à cette tragédie est d’arrêter l’hémorragie syrienne. Signe de cet engagement fort, le Maroc organise en décembre 2012 à Marrakech une des réunions décisives de soutien à l’opposition syrienne. Lors de la rencontre de Montreux, le Maroc par la voix de son ministre des affaires étrangères, Salaheddine Mezouar, avec force la proche marocaine de cette crise syrienne: "Il est grand temps pour les parties de prendre des décisions courageuses et de faire des concessions qu’exige l’esprit de réalisme et de compromis".
La Tunisie elle, de part le fait que l’actuelle élite qui dirige le pouvoir soit issue d’un mouvement de contestation populaire qui avait réussi à défaire un régime policier d’abord puis islamiste ensuite, ne peut qu’avoir de la sympathie et de la compréhension à l’égard de l’opposition syrienne. Pour elle, Bachar al Assad rappelle beaucoup le régime policier de Zine El Abidine Ben Ali.