Hollande, Sarkozy et la guerre contre le terrorisme
Comme cela était largement prévisible, la guerre contre le terrorisme est une thématique qui domine la campagne des présidentielles françaises dont les primaires automne/Hiver vont être un bouillant lever de rideau. Ce sujet a été donc choisi par François Hollande pour s’adresser aux Français après une longue hibernation qui devenait inquiétante pour ses amis. Les sondages catastrophiques qui reflètent le refus des Français à sa reconduction l’ont incité à sortir du bois plutôt que prévu.
Par Mustapha Tossa
Volant à la rescousse de Hollande, le Premier ministre Manuel Valls a tenu à éclairer la situation :" Tous les jours, les services de renseignement, la police, la gendarmerie, tous les jours, déjouent des attentats, démantèlent des filières irako-syriennes (…) Aujourd’hui, la menace est maximale, et nous sommes une cible – chacun l’a compris. Cette semaine, au moins deux attentats ont été déjoués". Et Manuel Valls de livrer un constat chiffré qui fait froid dans le dos : "Nous avons près de 700 jihadistes français et résidents en France, qui combattent actuellement en Irak et en Syrie (..) 275 femmes et plusieurs dizaines de mineurs. Nous avons sur notre territoire (…) 1.350 personnes visées par des enquêtes qui sont aujourd’hui en prison, 293 en lien directement avec des filières terroristes (..) et on peut considérer- je comprends le poids de ces chiffres – qu’il y a à peu près 15.000 personnes qui sont suivies parce qu’elles sont dans un processus de radicalisation"
Dans son approche, François Hollande a tenté de montrer que la droite propose des thérapies susceptibles de porter atteinte aux valeurs fondatrices de la république et de l’État de droit . L’idée d’Interner les fichiers S et la pratique de la prison préventive sur simple soupçon est perçue à gauche comme une dangereuse escalade. Nicolas Sarkozy répond au président de la république que la gauche au pouvoir n’a pas mis tout en œuvre pour protéger les Français des organisations terroristes qui visent sa sécurité. Et que lui, si les Français lui redonnent l’Elysée, pourra changer de fond en comble l’arsenal juridique destiné à lutter contre le terrorisme.
Sarkozy formule les propositions de la droite de cette manière :" Tout étranger suspecté d’être en lien avec une activité terroriste devrait être expulsé sans délai. Tout Français suspecté d’être lié au terrorisme, parce qu’il consulte régulièrement un site djihadiste, que son comportement témoigne d’une radicalisation ou parce qu’il est en contact étroit avec des personnes radicalisées, doit faire l’objet d’un placement préventif dans un centre de rétention fermé. Et qu’on ne me dise pas que ce serait Guantanamo ! En France, tout enfermement administratif est soumis au contrôle a posteriori d’un juge, et je ne propose pas autre chose". La droite semble suive cette ligne politique: À situation exceptionnelle, législation exceptionnelle. C’est l’Etat de droit qui doit s’adapter à la menace et non l’inverse.
Ce débat très clivant implique un seul constat: la préoccupation sécuritaire a de fortes chances de monopoliser le coeur de la campagne présidentielle. Il faut dire que les deux protagonistes. Hollande et Sarkozy ont un intérêt politique à fixer le curseur sur ce sujet. Pour Hollande, c’est une manière d’évacuer à moindre frais ses multiples échecs sur la plan économique et son incapacité inverser les chiffres du chômage. Pour Sarkozy, le terrain de la sécurité est presque le seul où il parvient à développer une posture déterminée et cohérente avec les multiples angoisses françaises. Hollande garant de l’Etat de droit, a intérêt à avoir en face de lui un Sarkozy qui assume, au nom de la sécurité vitale, ses possibles violations. Le spectre est ainsi posé. La campagne peut se dérouler sauf irruption et perturbation inattendues des extrêmes. Jean Luc Mélenchon pour l’extrême gauche et Marine Le Pen pour l’extrême droite.