François Hollande, Boko Haram, Vladmir Poutine et l’Europe
La séquence politique que vit François Hollande est assez particulière en ce moment. Elle est à la fois annonciatrice d’un probable grand désastre politique et en même temps de possibles fulgurances diplomatiques. À peine sorti groggy des élections municipale où il était obligé de scarifier son fidèle Jean Marc Ayrault au profit du jeune quinqua aux dents longues et la popularité provocatrice, Manuel Valls, le voilà, calendrier oblige, immédiatement soumis à un autre test de confiance, celui des élections européennes.
Par Mustapha Tossa
Interpellé lors de ses sorties médiatiques sur son inefficacité et son amateurisme, François Hollande avait appelé à la rescousse l’implication de la France dans les théâtres d’opération internationales, notamment africains et la fermeté avec laquelle sa diplomatie avait traité les crises iranienne et syrienne pour défendre son bilan et infirmer ces accusations. Aujourd’hui, le contexte international offre à François Hollande la possibilité de déployer encore plus les gammes de sa fermeté et sa détermination.
Deux crises majeures peuvent être saisies par le président français pour tenter de reprendre la main au niveau de l’opinion. La première est la crise ukrainienne qui menace de dégénérer en guerre civile depuis que Vladimir Poutine a décidé de se venger du gouvernement pro européen en démembrant l’Ukraine. Il est vrai que sur ce terrain, François Hollande est quelque peu devancé par la chancelière allemande Angela Merkel dont la parole est plus audible à Moscou que celle de Paris. Mais le président français peut très bien épouser le contour d’une posture de fermeté à l’égard de Poutine telle que les Américains, faute d’option militaire viable, la dessinent. Cette nouvelle tonalité française a été entendue lors de leur rencontre à Stralsund en Allemagne. La tenue de l’élection présidentielle ukrainienne prévue ce 25 mai est présentée comme la ligne de démarcation à partir de laquelle une nouvelle approche doit entre envisagée pour traiter la crise ukrainienne. De nombreux observateurs ont décelé dans cette déclaration franco-allemande une dose de fermeté insufflée par François Hollande.
La seconde crise que le président français peut exploiter pour rendre sa parole plus audible et son approche plus visible, c’est la crise des 200 lycéennes nigérianes enlevées par le groupe terroriste Boko Haram. L’affaire est en train de provoquer un émoi international qui justifierait toutes les interventions. Tous les ingrédients sont réunis pour donner à cette intervention toutes sortes de citations. Un groupe qui mélange religion et grand banditisme terrorise la population nigériane, kidnappent des adolescentes, les marchandent comme des esclaves des temps obscurs.
Certain de son impunité, le groupe Boko Haram nargue la communauté internationale, lui lance des défis. Les vidéos qu’il publie font apparaître la nouvelle icône du terrorisme en Afrique, le chef de Boko Haram Aboubakar Shekau. Il provoque la communauté internationale en duel. Il est vrai que des experts français, américains et anglais ont été déployés sur le terrain pour aider le gouvernement nigérian à éradiquer le groupe Boko Haram, mais dans le cas où les résultats se font attendre et que le calvaire de ces adolescentes perdure, il n’y aura d’autres choix que d’imaginer une forme d’intervention internationale pour casser les Boko Haram, baptisés par les presse " Talibans d’Afrique".
Et là tous les regards se dirigent vers la France de François Hollande déjà impliquée en l’espace d’une courte période dans deux aventures militaires africaines, le Mali et la Centre Afrique. Il est vrai que le Nigeria, d’obédience britannique, ne fait pas partie de son traditionnel territoire d’influence. Mais François Hollande peut très bien mettre à profit son expertise des crises africaines, déploiement de ses soldats dans les pays avoisinants pour impulser la dynamique et la détermination qui fait actuellement défaut pour traiter cette crise devenue une indignation internationale. Sa proposition de tenir un somment africain à Paris le 17 mai, en présence du président Jonathan Goodluck, pour imaginer les réponses à apporter à cette crise va dans ce sens.