France-Rwanda: vers la réconciliation ?

Nicolas Sarkozy, en visite jeudi au Rwanda, a reconnu de « graves erreurs d’appréciation » et « une forme d’aveuglement » de la France et de la commnauté internationale.

France-Rwanda: vers la réconciliation ?
Vingt-cinq ans après la dernière visite d’un président français au Rwanda, le chef de l’Etat français a conclu jeudi son séjour de quelques heures à Kigali, au Rwanda, en reconnaissant la part de la responsabilité de la France et de la communauté internationale dans le génocide.

Dès sa descente d’avion, le président français est allé directement s’incliner « Au nom du peuple français », devant les stèles du Mémorial de Kigali où gisent les 250 000 des 800 000 victimes du génocide des Tutsis.

"Ce qui s’est passé ici est inacceptable, mais ce qui s’est passé ici oblige la communauté internationale, dont la France, à réfléchir à ses erreurs qui l’ont empêchée de prévenir et d’arrêter ce crime épouvantable", a déclaré M. Sarkozy lors d’une conférence conjointe avec Paul Kagamé.

Pour le président rwandais, "Au delà de la compréhension et de la recherche de ce qui s’est passé, il est temps de mettre sur pied une nouvelle relation, un nouveau partenariat basé sur la compréhension et la gestion correcte de la vérité".
"Nous refusons d’être otages du passé. Des erreurs ont été reconnues, on en a discuté. Et au fur et à mesure que nous abordons cette réalité, l’essentiel est de regarder vers l’avenir", a-t-il ajouté, avant d’annoncer sa participation au Sommet France-Afrique, prévu à Nice fin mai.

Depuis 1994, le régime de Paul Kagamé a accusé la France de complicité de génocide pour avoir soutenu celui de son prédécesseur Juvenal Habyarimana. Paris a toujours rejeté ces accusations.

Dès 2006, les tensions franco-rwandaises se font encore plus vives. En janvier de la même année, Paul Kagamé réclame de la France qu’elle reconnaisse sa responsabilité dans ce génocide. Quelques mois plus tard, le juge français Jean-Louis Bruguière signe neuf mandats d’arrêts contre des proches de Paul Kagamé. Selon le juge, la rébellion Tutsie du FPR (le Front patriotique rwandais) est engagée dans l’attentat qui a déclenché le génocide. En 1994 c’est Paul Kagamé qui dirigeait le FPR.
Le 24 novembre 2006, le Rwanda rompt officiellement ses relations diplomatiques avec la France. Elles ne reprendront officiellement que fin 2009.

Selon l’expression même de Nicolas Sarkozy, cette visite est « à très forte portée symbolique. L’objectif affiché par l’entourage de Nicolas Sarkozy : "se tourner vers l’avenir sans oublier le passé".

Pour explorer ces 16 années d’histoires troubles, les délégations françaises et rwandaises ont discuté de la proposition faite ce week-end par Bernard Kouchner. Le ministre français des affaires étrangères, qui a des liens avec Paul Kagamé, a proposé dans le « Journal du Dimanche » de créer "une commission d’historiens pour établir ce qui s’est passé alors".

Lors de ce bref séjour, Nicolas Sarkozy a, également, évoqué les contours d’un nouveau partenariat entre les deux pays. La France n’oublie pas que la région des Grands lacs a un sous-sol minier riche, notamment à la frontière du Kivu congolais.

Paris – Kigali : seize années de tensions

6 avril 1994 : L’avion du Président rwandais, le hutu Habyarimana, est abattu au dessus de Kigali par un missile.
7 avril 1994 : Début du génocide. 800.000 personnes majoritairement Tutsies, sont tuées en quelques mois seulement.
22 juin 1994 : La France intervient au Rwanda. C’est le début de "l’opération turquoise".
4 juillet 1994 : le FPR de Paul Kagamé, la rébellion Tutsie, prend la capitale Kigali et s’installe à la tête de l’Etat.
30 janvier 2006 : Paul Kagamé demande que la France reconnaisse sa responsabilité dans le génocide. Il accuse les français d’avoir aidé les génocidaires.
22 novembre 2006 : Jean-Louis Bruguière signe neuf mandats d’arrêt contre les proches de Paul Kagamé. Ils sont accusés d’avoir une responsabilité dans l’attentat du 6 avril.
24 novembre 2006 : Le Rwanda rompt ses relations diplomatiques avec la France
8 décembre 2007 : Nicolas Sarkozy rencontre Paul Kagamé à Lisbonne
Août 2009 : Un rapport du Rwanda accuse plusieurs responsables français (dont Édouard Balladur, Alain Juppé ou Hubert Védrine) pour le soutien apporté aux massacres hutus.
29 novembre 2009 : Reprise des relations diplomatiques entre les deux pays.
23 février 2010 : Réouverture de l’ambassade du Rwanda à Paris.

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