Sans doute, Bernard Kouchner savait-il mieux que personne que sa trahison des socialistes et son passage avec armes et bagages dans les écuries de Nicolas Sarkozy, qui l’avait souvent présenté comme une précieuse «prise de guerre», n’allaient pas rester impunis. Sans doute était-il certain que sa greffe au sein d’une certaine droite maugréant de frustration et qui n’a jamais avalé le principe sacrificiel de l’ouverture allait lui revenir comme un sanglant effet boomerang.
Ce qui est certain aujourd’hui, c’est que Bernard Kouchner, quelques courtes semaines seulement après avoir été débarqué du gouvernement, se trouve déjà à la fois sur la défensive et en pleine tempête, à devoir justifier des choix et rendre des comptes. Il est actuellement au cœur de trois grandes affaires qui secouent violemment l’actualité.
La première affaire est celle du scandale du médicament le Mediator. A lui aussi, en tant qu’ancien secrétaire d’Etat à la Santé rattaché au ministère de l’Emploi et de la Solidarité que dirigeait en 1998 Martine Aubry. À Bernard Kouchner ainsi que son directeur de cabinet de l’époque Martin Hirsch, la presse relaie des reproches d’avoir ignoré les alertes sur la dangerosité du Mediator. Ce reproche touche par ailleurs tous les responsables de la santé qui se sont succédé y compris l’actuel ministre en titre Xavier Bertrand.
La seconde affaire qui secoue l’icône de Bernard Kouchner, retiré du gouvernement, est l’affaire des enfants haïtiens en attente d’adoption par les couples français. Lorsque l’actuelle ministre des Affaires étrangères Michèle Alliot-Marie a décidé d’envoyer sur le champ un avion pour récupérer ces enfants à Haïti, la parole des responsables du secteur de l’adoption s’est libérée pour condamner l’inaction de Bernard Kouchner et suggérer que son manque d’initiatives a déjà causé la mort de six enfants prêts à être adoptés et rapatriés en France.
La troisième affaire a des dimensions privées et personnelles. Elle touche l’implication de sa campagne Christine Ockrent dans une affaire d’espionnage interne qui secoue l’audiovisuel extérieur de la France dont elle directrice générale déléguée et que dirige Alain de Pouzilhac. Soumise à une fronde sans précédent de la part des journalistes qu’elle dirige, invitée à quitter ses responsabilités pour cause de lien de confiance rompu avec son encadrement, Christine Ockrent résiste, se prévalant de la confiance de la tutelle, en l’occurrence l’Etat.
La légende veut qu’avant de rendre son tablier, Bernard Kouchner aurait demandé à Nicolas Sarkozy de veiller sur Christine Ockrent. C’est ce qui explique sans aucun doute que malgré les effets dévastateurs de ce scandale sur l’image de la France dans le monde, Nicolas Sarkozy observe un silence inhabituel, tarde à réagir, donnant cette vague impression d’avoir perdu sa capacité à trancher.