Et pourtant les sujets de discorde ne manquent pas. C’est ce qui pimente le calendrier diplomatique. Avec les Américains d’abord. L’application d’un slogan électoral de Donald Trump « America First » commence à trouver des traductions économiques et politiques et altérer ses rapports avec ses alliés. Ses dernières décisions d’épaissir les barrières douanières sur certains produits comme l’acier ont été très mal perçues par l’Union européenne qui lors de son dernier sommet de Bruxelles a laissé transpirer quelques aigreurs et quelques menaces de réciprocité à peine voilées. Un fait qui au minimum augure d’une sourde tension quand il n’ouvre pas la voie à une guerre commerciale entre deux grands alliés de la famille occidentale.
Sur le plan politique, la menace proférée par Donald Trump de se retirer de l’accord international sur le nucléaire iranien fait peser sur la stabilité régionale une menace vitale. Emmanuel Macron, parlant au nom de l’Europe avait souligné la validité politique et stratégique de cette entente avec le régime iranien indiquant implicitement que toute remise en cause en l’état pourrait mener à une déstabilisation régionale. Macron ne rate aucune occasion pour adresser des messages au leadership iranien de renoncer à la fois à son programme balistique et son agressivité hégémonique à l’égard de ses voisins.
Avec la Russie de Vladimir Poutine, le niveau de tension est monté d’un cran suite à l’affaire de l’espion russe Sergueï Skripal. Alors que l’Union Européenne était en relation de négociation difficile avec la Grande Bretagne de Thérèsa May à cause des aléas du Brexit, Emmanuel Macron est monté au créneau pour faire preuve d’une fermeté inédite à l’égard de Moscou et d’une solidarité déterminée et à toute épreuve avec Londres. Cela s’est traduit par l’expulsion de diplomates et une tension politique et verbale entre les deux blocs (Russie/Europe) qui rappellent les heures sombres de la guerre froide.
Et pourtant entre Donald Trump, Vladimir Poutine d’un côté et Emmanuel Macron de l’autre, le chemin était pavé de bonnes résolutions produites par de bonnes fées. Dès son arrivée à l’Elysée, le président Français s’est ingénié à innover dans la relation quitte à produire des ruptures ou à aller à contre sens. Avec la Russie, la relation sous l’ère François Hollande était au point mort. Emmanuel Maçon était venu casser cette dynamique paralysante. D’où la réception en grandes pompes de Vladimir Poutine au château de Versailles, d’où cette volonté de sortir à tout prix la Russie de l’angle antagoniste des relations internationales en militant pour un changement de ton à son égard et d’essayer de l’intégrer dans un schéma multilatéral, le seul capable de solutionner des crises régionales. Le risque de ce pari était sans doute d’encourager le penchant autocrate de Vladimir Poutine qui pourrait interpréter l’ouverture des Européens à son égard comme un signe de faiblesse.
Avec Donald Trump, Emmanuel Macron est parti à contre-courant de sa nature. Le nationalisme restreint Donald Trump choque profondément les valeurs et la doctrine de croyances d’Emmanuel Macron nourri au biberon de la mondialisation et de l’ouverture économique. Et pourtant, cela ne l’a pas empêché de dérouler le tapis rouge au nouveau président américain. Les images complices de la Tour Eiffel et du 14 juillet sont encore présentes dans les mémoires pour souligner cette complicité hors norme et cette alchimie forcée. Il est vrai qu’à cette période l’enjeu gravissime pour Emmanuel Macron était de tenter de séduire Donald Trump et le convaincre de ne pas se retirer l’accord climat de Paris obtenu au forceps et après un accouchement douloureux de la diplomatie française.
Signe des temps favorables pour les postures diplomatiques d’Emmanuel Macron, sa rencontre avec Donald Trump et Vladimir Poutine intervient alors que le premier incarne une volonté nationaliste agressive pyromane et de repli sur soi et le second une tentation autoritaire et hégémonique. Il n’aura aucun mal à célébrer les esprits du multilatéralisme pacifique et pourra incarner au nom de l’Europe la modération et la sagesse qui font défaut à ces deux illustres interlocuteurs.