La relation entre les deux pays aurait pu continuer longtemps sur ce rythme de « ni paix ni guerre », la tension servant de réceptacle aux frustrations et de cache misères aux indigences managériales algériennes. Sauf qu’Alger par le biais de son ministre des Affaires étrangères a pris cette décision stratégique de donner à la fois un tournant et une accélération à ses relations effervescentes avec son voisin marocain. Stratégie mûrement réfléchie qui plonge la région dans l’inconnu et qui installe un climat de rupture et de tension.
Cette crise et ses violentes répercussions dans les médias et les réseaux sociaux ont montré deux indicateurs incontournables qui vont influencer durablement l’atmosphère politique au Maghreb. Si les Marocains, diplomates, journalistes, intellectuels et citoyens ordinaires, ont exprimé leurs indignations à l’égard de ces accusations aussi graves qu’inédites, ce qui était enfin de compte attendu, la réelle nouveauté réside dans la réaction de la presse et de l’opinion algérienne.
Jamais sans doute et même au pire des années noires algériennes, la gouvernance de Bouteflika ne fut aussi interpellée avec cette violence de la part de certaines plumes algériennes et non des moindres. Le Messahel fut pris à partie chez lui dans un rouleau compresseur de critiques et de charges qui dévoilent les failles économiques et politiques du « modèle » algérien. Il est devenu l’icône vivante du mensonge et de l’incompétence. Il n’y qu’a voir le fulgurant succès dans les réseaux sociaux de vidéos de personnalités connues et d’anonymes qui mettent le ministre Messahel et son Premier ministre Ahmed Ouyahia devant le miroir de leurs échecs. Cette crise intervenant à un moment clé où différents réseaux et lieux de pouvoirs sont en train de se positionner pour prendre part à la bataille de la succession de Bouteflika.
D’ailleurs, le sport favori dans cette ambiance est de se livrer à une comparaison entre les deux sociétés, leurs économies et leurs performances. Elle montre l’essor et la dynamique marocaine contre la stagnation algérienne. Les réussites d’une économie marocaine d’entreprises face aux échecs d’une faillite algérienne basée sur la rente pétrolière et l’assistanat. Cela s’appelle l’effet boomerang. En voulant détourner l’agressivité des Algériens vers le voisin marocain, les responsables algériens se sont pris un violent retour de bâtons qui éclaire avec beaucoup de pertinence l’ampleur de leurs défaillances.
Le second indicateur de cette escalade algérienne contre le Maroc renseigne sur la profondeur du fossé qui sépare les autorités des deux pays. Est-il simplement possible d’imaginer une rencontre ou une poignée de main même symbolique, même furtive entre les deux ministres des Affaires étrangers des deux, l’algérien Abdelkader Messahel et le marocain Nasser Bourita? La dernière séquence de la relation entre les deux pays interdit de l’imaginer.
En choisissant de rompre de cette manière spectaculaire avec le Maroc, l’Algérie confirme que pendant le mandat de Bouteflika , aucun espoir n’est permis de voir l’axe Rabat/ Alger connaître un apaisement ou même reprendre de la vigueur. Bien au contraire, le régime de Bouteflika dont A.Messahel est un prototype parlant aiguise ses derniers cartouches pour installer une atmosphère de terre brûlée que laisse entrevoir une gouvernance algérienne aux abois et qui peut en désespoir de cause commettre des actes irresponsables, voire de folie.
L’Algérie actuelle est donc cadenassée dans sa haine pour le Maroc. Elle construit ses relations avec son voisinage sur la base du défi et de l’antagonisme. Elle confirme son statut de source d’inquiétudes et d’angoisse pour l’ensemble de la région.