Chose dite, chose faite! Les services de l’ambassade d’Egypte à Paris ont passé en revue les mosquées dignes d’accueillir l’illustre hôte, issu des rangs des Frères musulmans. Le choix étant limité, il s’est vite arrêté sur la Grande mosquée de Paris.
En dehors de cette mosquée, Paris ne compte que des lieux de culte fort modestes. Deux grandes mosquées sont situées en région parisienne, celle d’Evry dont le maire est l’actuel ministre de l’Intérieur Manuel Valls et celle de la Courneuve, contrôlée par l’Union des organisations islamiques de France, réputée proche des Frères musulmans. Les deux ont peut-être la fâcheuse particularité de se trouver loin du centre de Paris.
Outre cette parenthèse spirituelle, le président égyptien aura des entretiens politiques, l’occasion d’expliquer au président François Hollande son opposition à l’intervention militaire française au Mali. Dans un discours tenu lundi 21 janvier à l’ouverture du sommet économique arabe, à Riyad, le président Mohamed Morsi s’est élevé contre les opérations des forces françaises au Mali "Nous n’acceptons en aucun cas l’intervention militaire au Mali (…) qui est de nature à alimenter le conflit dans la région", a-t-il déclaré.
"Depuis son élection, l’une des priorités de Mohamed Morsi est de replacer l’Egypte comme un acteur-clé, voire incontournable de la région, en prouvant son indépendance à l’égard des Occidentaux, et ce, par opposition au président Moubarak, souvent critiqué pour son alignement quasi-systématique sur les positions des grandes puissances", analyse Sonia Dridi, correspondante de France 24 au Caire, précisant que l’électorat de la Confrérie attend que le pouvoir affiche des positions tranchantes en matière de politique étrangère.
Le président Morsi cherche ainsi à rassurer les courants islamistes et à flatter les salafistes qui ont condamné cette intervention, en prévision notamment des élections législatives prévues en avril prochain.
La visite en France comporte également un volet économique. Le président Morsi rencontrera le 1er février le patronat français (MEDEF) pour inciter les investisseurs à revenir en Egypte qui traverse une très grave crises économique et sociale. Le tourisme, moteur de l’économie égyptienne, est complètement à l’arrêt et les touristes étrangers ne sont pas prêts de dévaler ni la vallée du Nil ni arpenter les pyramides de Ghiza tant que la situation politique et sécuritaire ne s’est pas améliorée.
Le 24 décembre dernier, après le référendum populaire sur une Constitution controversée, l’agence de notation Standard and Poor’s (S&P) a revu à la baisse la notation des trois plus grandes banques égyptiennes à B- au lieu de B pour l’emprunt souverain à long terme. Une autre baisse est prévue si l’instabilité politique persiste", avertit S&P. Il s’agit, en fait, de la troisième fois depuis le 25 janvier 2011 que la notation de l’Egypte est revue à la baisse sur fond d’instabilité politique.
Cette crise politique s’était amplifiée le 22 novembre dernier quand le président Morsi a émis une déclaration constitutionnelle lui accordant une immunité temporaire contre toute poursuite judiciaire et protégeant le Conseil consultatif et l’assemblée constituante, à majorité islamiste, contre une dissolution par la Haute Cour constitutionnelle.
Pour pallier à la crise, l’Egypte est actuellement en discussion avec certaines institutions financières internationales notamment le Fonds monétaire international (FMI) pour un prêt de 4,8 milliards de dollars.afin de remettre à flot un pays au bord de la faillite. Début janvier, le Qatar avait annoncé avoir avancé 2,5 milliards de dollars (1,9 milliard d’euros) à l’Egypte pour l’aider à faire face à sa crise monétaire.
Naguère prisée des investisseurs sur les marchés émergents, l’Egypte traverse une crise économique très difficile catastrophique. Son déficit budgétaire s’est creusé à 11% du PIB sur l’exercice fiscal qui s’est terminé en juin, et est attendu à plus de 10% sur les douze mois suivants.
Dans le même temps, les réserves de changes ont subi une véritable hémorragie, à hauteur de 600 millions de dollars par mois, et sont retombées à 15 milliards, moins de la moitié de ce qu’elles étaient avant la chute de Moubarak.