Macron, couacs et grincements
Le nouveau président Français Emmanuel Macron n’a pas encore investi son nouvel habit présidentiel que déjà les couacs et les grincements ont entaché ce qui aurait pu ressembler à une lune de miel méritée ou à une période de grâce légitime.
Par Mustapha Tossa
Le premier grand malaise qui a eu pour effet immédiat de ternir l’ambiance euphorique de la victoire d’Emmanuel Macron fut le supplice chinois appliqué par "En Marche" à la candidature de l’ancien Premier ministre Manuel Valls. La manière de l’équipe de campagne du nouveau président n’était pas tant de marquer leurs différences politiques avec Manuel Valls qui justifierait logiquement une fin de non recevoir à sa demande d’investiture que le style volontairement et humiliant avec lequel l’ancien premier ministre fut traité. Rancune et manque de recul et de grandeur, tels furent les marqueurs instantanés qui ont révélé un visage inconnu mouvement En Marche. Dans l’affaire Valls, les lieutenants étaient à l’action pour rabaisser et humilier un concurrent et un adversaire et Emmanuel Macron était la manœuvre, sans doute avec le secret désir de solder un vieux compte.
Le second malaise a été produit par l’allié de taille d’Emmanuel Macron, le centriste François Bayrou. Son ralliement à En Marche fut crucial à un moment où Emmanuel Macron manquait d’alliances politiques de poids et de colonne vertébrale idéologique. Bayrou avait donné de la contenance a Macron et a pavé la route à de nombreux ralliements et autres sympathies de la droite et du centre. Les divergences entre Macron et Bayrou sur le casting parlementaire sont de nature à affaiblir toute la stratégie des marcheurs. Elles jettent du discrédit sur leurs capacités à honorer les paroles et réaliser des alliances gagnantes. La mauvaise humeur de Bayrou, même si elle ne renversera pas la tendance, installera une atmosphère de méfiance et de défiance qui se paiera cash lors des prochains législatives.
Le troisième malaise touche la relation de séduction autoritaire que le mouvement en Marche tente d’installer avec les autres partis politiques, notamment Les socialistes et les républicains. Enivré par le succès d’Emmanuel Macron à la présidentielle, En Marche adopte un ton un poil arrogant à l’égard des autres partis politiques, sommant quelques uns de leurs plus brillantes ressources humaines de se rendre avec armes et bagages sous peine d’être effacés de la carte politique nationale. L’équipe Macron parie sur une hypothétique vague en Marche qui donnerait les pleins pouvoirs au président élu selon la vielle tradition que quand les Français offrent l’Elysée à une personnalité, ils le gratifient automatiquement d’une majorité confortable pour lui permettre de porter son projet et de gouverner. Or En Marche est un mouvement jeune, et malgré le talent et l’enthousiaste des marcheurs, les territoires ne sont pas investis en profondeur. D’un autre côté, il est une réalité à prendre en considération, pour beaucoup le vote Macron s’est fait plus pour barrer la route à l’extrême droite que par adhésion aux valeurs et aux postures d’En Marche. Or ce nouveau parti se comporte comme si le pays entier s’est levé pour porter aux nues la nouvelle icône de la politique française.
Partant de ce constat, l’attitude arrogante de l’équipe En Marche, ses maladresses de débutants et les haines recuites de ses dirigeants, peuvent avoir un effet inverse. Donner un grand coup de fouet aux partis traditionnels pour qu’ils se reprennent et réalisent de jolis scores. Les socialistes et les républicains sont sommés de réagir sils ne veulent pas disparaître. Et si on rajoute à cette situation les beaux résultats promis au Front de Gauche de Jean Luc Mélenchon et au Front National de Marine Le Pen, la Vague En marche espérée par Emmanuel Macron peut n’être qu’un mirage obligeant le nouveau président à de douloureuses contorsions pour obtenir une majorité parlementaire tenable.