C’est qu’un des péchés originaux de la démarche de Martine Aubry est que dés le début des sélections des candidats aux primaires, elle se soumet à la domination de DSK dans les sondages. Elle a fait savoir à plusieurs reprises qu’elle ne barrerait jamais la route à celui que l’opinion semble avoir élu pour incarner l’alternative socialiste à Nicolas Sarkozy. Ce grand deal entre éléphants socialistes a fait à plusieurs reprises le bonheur des pages confidentielles et souvent l’auréole des Unes des magazines.
La chute de DSK laisse Martine Aubry orpheline de ces petits arrangements entre amis. Et la grande question qui se posait pour elle est la suivante: comment remonter la pente, retrouver une crédibilité de parole après avoir été prête à sous-traiter à d’autres la victoire de son parti. Le plus dure fut sans doute que dans cette de sacrifice, Martine Aubry montra le peu d’enthousiasme et le manque de désir que lui inspire la course à la présidentielle.
Sous prétexte de vouloir absolument respecter le calendrier, Martine Aubry ne faisait que déférer l’annonce d’un retour sur décision qu’elle a longtemps évité. Cette grande hésitation que ses détracteurs ont bien exploitée confirma cette impression que la maire de Lilles, fille de Jacques Delors, surnommée "la dames des 35 heures", était plus dans l’hésitation interrogative que dans la détermination volontaire. Elle confirma un fait encore plus dangereux. Son engagement dans les primaires socialistes est plus l’œuvre de pressions de son entourage que le fruit de sa propre réflexion.
C’est qu’entre temps, un ciel dégagé de la suprématie de DSK ouvre un grand boulevard devant un autre outsider, François Hollande. L’homme devait à la base jouer les figurants et les chauffeurs de campagne. Le voila qui se retrouve subitement à attirer la lumière e à prendre la place de grand favori dans les sondages, celle que par un miracle inexpliqué , DSK avait longtemps prise.
L’hostilité au sein du PS à Francois Hollande fut telle que toutes les bonnes volontés se sont liguées contre lui pour convaincre Martine Aubry de se jeter dans la bataille. Plus les anti-Hollande se confédèrent, plus la marge de manoeuvre de Martine Aubry se rétrécit. Elle n’a plus le choix que de se lancer si elle ne veut pas se trouver en position d’attachée de campagne à Ségolène Royal, incarnation vivante de la défaite de 2007, ou à François Hollande rejeté par une grande partie de l’appareil du parti.
Obligée donc d’y aller, Martine Aubry se doit de trouver sa propre intonation. En bonne gardienne du temple, elle s’était, en termes politiques, interdite tous les écarts. Là où d’autres candidats avaient la possibilité de briller en s’inventant d’autres horizons, elle est restée protectrice du dogme, conservatrice du bien familial, imperméable aux grande ruptures que nécessite la confection d’un leadership efficace.
Un homme doit se réjouir de l’entrée en lice de Martine Aubry, c’est Nicolas Sarkozy, convaincu qu’il n’en ferait qu’une bouchée. Et la question qui hante tous les esprits: Martine Aubry a-t-elle les épaules assez larges, le charisme suffisamment actif pour affronter un homme monté sur ressort, déterminé à renouveler son bail. Si les primaires socialistes, à cause d’un jeu d’appareil, sont à sa portée, l’affrontement présidentiel est d’une autre facture. Tous ceux qui doutent de ses capacités ont en mémoire sa mine éternellement boudeuse, son look presque "nature", son phrasé si peu entrainant.
Les plus optimistes des soutiens de Martine Aubry misent sur la transformation qu’une campagne Electorale qui s’annonce dure et sans pitié pourra faire subir à la candidate Aubry. Ils misent aussi sur la profondeur et la persistance du rejet qui s’abat sur la gouvernance de Nicolas Sarkozy et qui aidera à créer les conditions d’une alternance.
Par Mustapha Tossa