L’enseignant-chercheur à l’université Cadi Ayyad de Marrakech, M’hammed Belarbila, commente dans une interview accordée à la MAP la résolution onusienne adoptée par le Conseil de Sécurité la veille de la célébration du 45ème anniversaire de la glorieuse Marche Verte, mettant en avant la prééminence de l’initiative marocaine d’autonomie, tout en soulignant le rôle de l’Algérie dans la persistance du conflit autour de la marocanité du Sahara.
Le Conseil de sécurité de l’ONU vient d’adopter la résolution 2548, qui réaffirme une nouvelle fois la pertinence de la position marocaine. Comment évaluer-vous cette résolution ?
A travers sa résolution 2548, le Conseil de Sécurité a situé le différend sur le Sahara dans son vrai contexte régional. Le statut de l’Algérie en tant qu’acteur et partie prenante dans ce conflit a été confirmé par la résolution onusienne. En effet, en soulignant l’importance de l’engagement de l’Algérie dans le processus politique relatif à ce conflit, ladite résolution est porteuse d’un message de clarté.
A cet égard, il faut noter que contrairement aux précédentes résolutions, ce dernier cite l’Algérie cinq fois, affirmant ainsi son rôle dans le financement et le soutien du Front Polisario. Donc à travers la nouvelle résolution, le Conseil de sécurité appelle l’Algérie à assumer son implication politique, diplomatique, militaire et humanitaire dans ce conflit régional. Aucun processus politique n’est envisageable sans l’implication effective et constructive de ce pays voisin. En somme, la nouvelle résolution ouvre la voie à des négociations plus poussées entre les parties.
Dans cette optique, seul le plan d’autonomie proposé en 2007 par le Maroc pour résoudre le conflit au Sahara, représente une solution politique réaliste, praticable et durable.
La résolution insiste sur le rôle de l’Algérie comme partie principale à ce conflit artificiel. Comment expliquer qu’Alger continue de faire fi des appels de la communauté internationale lui demandant de s’impliquer effectivement dans le processus politique pour le règlement de ce conflit régional ?
L’exécutif algérien n’arrive pas à encore à digérer que la ligne référendaire est renvoyée aux calendes grecques. En fait, la question du Sahara a été traditionnellement placée au centre des luttes d’influences du régime algérien. Or, la dernière résolution 2548 du Conseil onusien laisse entendre que ce mode de règlement n’est pas le plus approprié pour régler ce conflit et qu’il convient de lui trouver une issue politique, acceptable par tous.
Le maintien du statu quo comme la tenue du référendum, personne n’y croit. L’actuel contexte mondial et régional impose des limites sérieuses à cette traditionnelle instrumentalisation du dossier saharien à des fins de politique intérieure du régime algérien. Celui-ci doit non seulement s’occuper de sa stabilité politique interne, mais œuvrer également à la résolution du conflit saharien. Certes, en paraissant renouer avec les choix diplomatiques de ces prédécesseurs en matière de gestion du conflit du Sahara, l’actuel chef de l’État algérien tente d’adopter une politique populiste qui s’inscrit bien dans la tradition politique algérienne consistant à agiter le spectre saharien à des fins de politique intérieure. Or, dans un pays où le moment héroïsé de la Guerre de libération est le fondement du pouvoir, les militaires algériens n’ont guère eu besoin d’instrumentaliser la rivalité avec le Maroc pour entretenir leur légitimité.
Que pensez-vous de la multiplication inquiétante des violations et des provocations du « polisario » ?
Le chantage via les récents événements à El Guerguerat constitue une vaine tentative de pression sur le Conseil de sécurité. Dans ce cadre, le Conseil de sécurité, tout en sommant le Polisario de cesser ses provocations et violations des accords militaires, a salué les efforts «sérieux » et « crédibles» du Maroc dans le processus de règlement politique de la question du Sahara. Dans la résolution 2548, le Conseil de sécurité rejoint le rapport du Secrétaire général dans l’inquiétude face aux violations récurrentes de l’Accord militaire de 1991 et de la menace réelle sur le cessez-le-feu. Faut-il rappeler que le Conseil de sécurité avait, dès sa résolution 2414 de 2018, demandé au Polisario d’exécuter « son retrait immédiat » de la zone tampon de Guergarate, et « de s’abstenir de se livrer à de tels actes déstabilisateurs », qui pourraient compromettre le processus politique.
Les Emirats arabes unis viennent d’inaugurer un consulat général à Laayoune. Comment voyez-vous cette dynamique d’ouverture de Consulats généraux de pays africains et arabes dans les provinces du sud du Royaume?
En dépit du fait que l’ouverture de consulats des pays amis dans les provinces sahariennes n’a pas été évoquée par le Conseil de sécurité dans la résolution 2548, il s’agit là d’un important acquis sur le plan de la souveraineté nationale. Ceci dit, le Royaume dispose en effet de l’avantage du terrain et continue d’asseoir sa légitimité sur ce territoire, notamment avec l’ouverture de plusieurs représentations consulaires dans les villes du Sud.
De même, ce succès diplomatique via l’ouverture des consulats, va permettre au Maroc d’attirer des flux d’investissements et de développer économiquement la région.