La malédiction du Polisario frappe l’Espagne

L’éviction de la ministre espagnole des Affaires étrangères Arancha  González Laya était attendue, pressentie comme inévitable si les royaumes voisins voulaient retrouver un semblant de sérénité dans leurs relations tendues. Il n’y avait en fait que cette voie pour retrouver le chemin du dialogue et de la coopération.

Arancha González Laya incarnait aux yeux de Marocains et des Espagnols  l’objet de cette crise inédite entre Rabat et Madrid. La mésaventure « Benbattouche », qui se voulait un cadeau discret aux services algériens en échange de concessions gazières sonnantes et trébuchantes, a eu un effet boomerang sur l’ensemble du gouvernement espagnol.

Plusieurs valeurs espagnoles, européennes et marocaines ont été remises en cause par l’entrée illégale en Espagne du chef des milices du Polisario Brahim Ghali. Une justice espagnole censée être indépendante ridiculisée, une législation européenne sur l’entrée et le séjour des étrangers recherchés traînée par terre, un partenariat, en théorie stratégique, avec le voisin marocain pulvérisé.

Face à cette catastrophe politique à multiples facettes, la ministre Arancha González Laya continuait contre vents et marrées à défendre son action et son bilan, pensant  dans doute que la méthode Coué finirait par apaiser les tensions et calmer les esprits.

Dans sa volonté de contrer le Maroc, les autorités espagnoles ont fait appel à la carte de pression européenne. Madrid pensait sans doute que si Bruxelles et Strasbourg fronçaient les sourcils en direction de Rabat, le Maroc allait baisser d’un ton le plafond de ses revendications. Or durant toute cette crise, le Maroc est resté droit dans ses bottes, solide sur ses convictions, imperturbable dans la défense de ses intérêts, prêt à toutes les hypothèses pour asseoir son unité de sa souveraineté.

Cette détermination, à elle seule, était un facteur paralysant toute action de la ministre Arancha González Laya contre le Maroc. Elle démagnétisait la ministre et rendait inopérante toute son agitation. Laya ne pouvait, par exemple, imaginer être reçue à Rabat tant qu’elle n’avait pas fait sa mue et reconnu ses erreurs. Elle subissait de plein fouet la malédiction du Polisario.

La justesse de la position marocaine était aidée et soutenue par de nombreuses voix espagnoles influentes qui s’interrogeaient sur la pertinence et l’amateurisme de leur diplomate en chef sur un sujet aussi explosif que l’affaire du Sahara et les relations avec le Maroc.

Aujourd’hui, Madrid offre un nouvel interlocuteur diplomatique au Maroc en la personne de l’ancien ambassadeur l’Espagne à Paris José Manuel Albares. Sans aucun doute, l’éviction de la ministre González Laya pourrait être perçue, à juste titre, comme un signe d’apaisement et une volonté de tourner la page de cette crise inédite entre la Maroc et l’Espagne.

Le Maroc attendra donc les signaux de la nouvelle administration espagnole pour savoir si les couacs de la ministre Laya étaient dus à son amateurisme et à sa méconnaissance des dossiers sensibles ou s’il s’agissait d’une doctrine enracinée au sein du gouvernement espagnol.

Les deux hypothèses offrent à la diplomatie marocaine des pistes à de multiples actions. Dans le premier cas, le nouveau ministre espagnol des Affaires étrangères, diplomate chevronné et grand connaisseur des équilibre politiques de la région, se chargera rapidement de rectifier le tir et redresser la barre. Dans ce cas, les signaux positifs devraient vite s’envoler de Madrid pour atteindre Rabat et redonner aux relations entre les deux pays le respect et la confiance qu’imposent l’histoire et la géographie.

Dans la seconde hypothèse où la duplicité espagnole serait profondément enracinée dans le gouvernement de Pedro Sanchez, le Maroc fort de son droit et de l’unanimité de son peuple et de sa classe politique sur l’affaire du Sahara, continuera cette politique minimaliste à l’égard de l’Espagne. La maîtrise du temps et la diversité des alliés seraient les précieux atouts qui vont déterminer la physionomie finale de cette confrontation.

Mais il est fort à parier que l’Espagne , qui a été violemment secouée par cette crise et dont elle n’a pas encore mesuré  les effets économiques dévastateurs, serait plus tentée par le rapprochement avec le Maroc que par la poursuite de cette rupture.

Les vents de l’histoire et de la diplomatie sont favorables aux ambitions marocaines. Pour l’Espagne comme pour certains milieux européens, continuer à parier sur un cheval perdant, le Polisario et sur son parrain en faillite totale politique et économique, l’Algérie, serait une offense à l’intelligence de leurs institutions et une atteinte grave à leurs propres intérêts.

 

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