Emmanuel Macron tarde à recevoir Tebboune

La visite du président algérien en France est devenue une sorte de marronnier politique dans les annales de la diplomatie entre la France et l’Algérie. Annoncée puis reportée à plusieurs reprises, elle est devenue le baromètre de l’état des relations entre les deux pays.

Le but à la fois ultime et urgent de l’entourage du président algérien Abdelmadjid Tebboune est d’organiser dans les plus brefs délais une visite d’État à France. Tous les contacts entre Alger et Paris, qu’ils soient téléphoniques ou physiques tournent autour de la nécessité d’organiser cette visite, devenue obsessionnelle. Sauf que l’urgence a changé de camp.

Avant c’était la France d’Emmanuel Macron, travaillée par un tropisme algérien qui se précipitait pour donner des gages de sympathie et de soutien au régime algérien. Des visites et des échanges fréquents et intenses à destination de l’Algérie donnaient chair à cette tendance. Paris courtisait le régime algérien, qui croyait tenir là une forme de faiblesse française, laissait libre court à ses caprices.

À plusieurs reprises, c’était Alger qui, formulant des demandes politiquement fantaisistes, provoquait intentionnellement les multiples reports. Paris subissait les humeurs du régime algérien, avant de parvenir à cette conclusion qui sautait aux yeux. Au sein du régime algérien, certains milieux très influents veulent mettre aujourd’hui fin à l’aventure Tebboune et bloquent son éventuelle visite en France.

La visite de Tebboune en France incarne cette lutte d’influence au sein du régime algérien entre des forces qui veulent garantir un second mandat à Tebboune et d’autres qui estiment qu’il a fait son temps et que ses échecs, en interne comme à l’international, sont tels qu’il faut se saisir de ce scrutin présidentiel pour trouver une autre personnalité qui portera leurs attentes.

Le clan Tebboune qui veut s’offrir un second mandat ne peut compter ni sur son bilan économique ni sur ses performances diplomatiques. Sur l’économie, l’Algérie, pays riches en produits énergétiques, subit de multiples carences au point que faire la queue pour obtenir des aliments essentiels comme le lait, l’huile ou autres produits de première nécessité est devenue une attitude sociale banale.

Sur le plan diplomatique, Tebboune ne peut présenter qu’un bilan de pyromane. Les relations d’Alger avec la plupart de pays sont soit dans une logique de rupture comme avec le Maroc, le Mali ou les Émirats arabes unis, soit au bord de la crise de nerfs comme avec de nombreuses capitales arabes et européennes. Le président algérien exporte au monde cette image d’un homme qui avance un couteau entre les dents, vociférant des insultes et des provocations à tout va.

Aujourd’hui sous la pression de ces échecs visibles, le régime algérien lance un SOS en direction de Paris et demande une bouée de sauvetage pour tenter de l’extraire de la nase où ses choix politiques l’ont enfermé. D’où ce sentiment d’urgence à organiser une visite de Tebboune à Paris. La France d’Emmanuel Macron n’est pas dans une situation enviable. Si la France accepte de recevoir en grandes pompes un président totalement cramé et discrédité politiquement, cela équivaut à prendre part dans cette controverse algéro-algérienne.

C’est ce qui explique sans doute les grandes hésitations françaises à accueillir le président Tebboune à Paris. Certaines sources évoquent une date après le mois de Ramadan mais sans donner aucune garantie qu’elle pourrait réellement intervenir. Il y a une solution qui pourrait être choisie par Emmanuel Macron, le maître absolu du « En Même temps ». Paris pourrait accueillir Tebboune mais sans l’exposition médiatique et politique exigée par le président algérien pour se faire mousser auprès de ses détracteurs.

À la différence du début de son mandat, Emmanuel Macron doit être revenu de ses illusions sur le régime algérien et doit regarder ce pays avec plus de réalisme. Et les réalités sautent aux yeux. Les échecs, les faillites sont le principal trait distinctif du bilan de ce régime algérien incarné par Tebboune.

Emmanuel Macron est devant des choix cornéliens. Ou accueillir et soutenir Tebboune et participer d’une manière décisive à la perpétuation de ce régime algérien basé sur l’autoritarisme politique et une prédation économique chronique, sans parler d’une attitude agressive permanente à l’égard de son voisinage. Ou prendre de la distance et signifier ouvertement que l’affaire de la présidentielle est d’abord une affaire algérienne et c’est à eux de faire le constat de l’échec de leur gouvernance. Le président algérien fait quant à lui de sa visite en France une véritable bouée de sauvetage qui lui permettrait de faire taire ses contestataires au sein de son propre sérail.

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