
Des dizaines de milliers d’opposants au chef de l’Etat égyptien Mohamed Morsi ont encerclé mardi soir le palais présidentiel au Caire pour exiger qu’il retire un décret par lequel il a considérablement élargi ses pouvoirs et qui a provoqué une profonde crise dans le pays.
Les manifestants, dont beaucoup font partie de groupes laïques et de gauche, ont pu s’approcher du palais après avoir coupé les barbelés installés à quelques centaines de mètres de là. La police anti-émeutes a fait usage de gaz lacrymogène pour tenter de les disperser, sans succès, et a battu en retraite.
Le président Mohamed Morsi a quitté le palais présidentiel sous la pression de manifestants qui entourent le palais sur trois côtés.
« Dégage ! », « Le peuple veut la chute du régime », slogans phare de la révolte qui a renversé Hosni Moubarak début 2011, ont scandé les protestataires, dont certains cognaient sur des lampadaires. Beaucoup, agitant des drapeaux égyptiens, accusent les Frères musulmans, dont M. Morsi est issu, d’avoir « vendu la révolution ».
Ils qualifient les nouveaux pouvoirs que s’est octroyés le président de « dictatoriaux », et manifestent contre un projet de Constitution devant être soumis à référendum dans moins de 15 jours.
L’Egypte vit une profonde crise politique depuis le décret du 22 novembre, par lequel M. Morsi, premier président islamiste du pays, a notamment mis ses décisions et la commission chargée de rédiger la future Constitution à l’abri de tout recours en justice.
Le pouvoir judiciaire, à qui le président a interdit de contester ses décisions, est aussi divisé.
Le Conseil supérieur de la justice, en charge des affaires administratives de la magistrature, a décidé lundi de déléguer des magistrats pour superviser le référendum malgré l’appel au boycott de plusieurs juges, ouvrant la voie à la tenue du scrutin. Les élections doivent en effet être placées sous supervision judiciaire en Egypte.
Mais mardi, le Club des juges, un syndicat professionnel en faveur du boycott, a campé sur sa position. « Nous ne pardonnerons pas » aux juges qui superviseront le vote, a lancé son président, Ahmed al-Zind, en affirmant que le nombre de juges opposés à la supervision du référendum dépassait de loin le nombre de ceux y étant favorables.
M. Morsi assure que son décret est « temporaire » et qu’il vise à accélérer les réformes démocratiques et à mettre fin à une tumultueuse période de transition. L’opposition estime qu’il s’engage dans la voie dictatoriale qui a coûté la présidence à Hosni Moubarak, et exige qu’il annule ses décisions.