Silence. «Ce n’est pas deux jours après avoir gagné tous les pouvoirs qu’on abandonnerait une proposition phare», complète-t-on à l’Elysée, où l’on n’a pas franchement apprécié que des médias relaient le possible enterrement de la proposition numéro 50 de Hollande. Une rumeur pourtant nourrie par le silence ambigu des socialistes sur la question pendant la campagne des législatives. Un profil bas assumé face à une UMP en chasse des électeurs d’extrême droite qui a transformé ce symbole politique de la gauche en contre-argument électoral, Jean-François Copé allant jusqu’à prédire «une catastrophe pour la cohésion nationale» si cette mesure voyait le jour.
Depuis, le PS s’essaie en réalité à un exercice compliqué : faire du droit de vote des étrangers un non-sujet sans donner l’impression de revenir sur une promesse très attendue, notamment en banlieue, où une part importante de la population est étrangère. Tellement symbolique que l’ancien garde des Sceaux Robert Badinter l’a comparée à l’abolition de la peine de mort qui avait ouvert le septennat de François Mitterrand. Et a enjoint François Hollande à la faire adopter le plus rapidement possible.
A écouter les confidences des députés hier à l’Assemblée, il n’est pourtant pas certain que les socialistes se pressent. «La priorité, c’est l’économique et le social en 1 et l’Europe en 2», font valoir plusieurs parlementaires. «Personne ne veut ni l’effacer de l’ordre du jour ni l’inscrire», analyse un député parisien pour qui cette mesure est carrément «symbolique du passé». Selon lui, elle s’adresserait uniquement aux «papas de plus de 60 ans» immigrés de la première génération.
Risques. Au ministère de l’Intérieur, on assure que tout sera prêt pour les prochaines municipales, programmées en 2014. Mais on pointe toutefois que la mise en œuvre de la mesure pourrait être difficile. «Il faut trouver le dispositif qui nous donne toutes les chances de succès, mais Manuel Valls est parfaitement conscient des risques d’échec», fait-on valoir place Beauvau.
De nombreux élus sont persuadés qu’il existe un «risque politique» à même ouvrir ce débat. «C’est une audace sans doute inappropriée», dit l’un d’eux. Dans un contexte où la gauche dispose d’infimes marges de manœuvre budgétaires, c’est pourtant une mesure qui ne coûterait rien.