En présentant lui-même la « stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté », Emmanuel Macron cherche à briser l’image de « président des riches » que lui colle l’opposition et qui a contribué à sa forte baisse dans les sondages. Il donne aussi des gages à l’aile gauche de sa majorité, qui appelait à un tournant social de la politique gouvernementale jugée trop libérale par certains élus.
Au début de son discours, il a ainsi repris sa formule sur les « premiers de cordée » qu’il avait utilisée à l’automne 2017 et qui lui avait valu une volée de bois vert. « Personne n’est premier de cordée si le reste de la société ne suit pas », a-t-il souligné, en appelant « les premiers de cordée à ne pas oublier les derniers de cordée ».
« Refuser la fatalité sociale, c’est lutter contre ce déterminisme qui, dès l’enfance, détruit des trajectoires de vie. […] Il y a dans chaque enfant, à commencer par un enfant qui naît dans une famille pauvre, un Mozart qu’on assassine parce qu’on décide de fait qu’il n’a aucune chance de devenir Mozart », a ajouté le chef de l’État. Il a annoncé que 50 millions seraient consacrés à l’aide sociale à l’enfance et sa volonté d’étendre le repas à un euro dans les cantines pour les plus fragiles.
8,8 millions de personnes pauvres
Avant de s’exprimer devant plusieurs ministres, dont celle des Solidarités Agnès Buzyn, Emmanuel Macron a entendu les témoignages « de personnes vivant dans la précarité ou ayant réussi à en sortir » interrogées par le délégué interministériel chargé du dossier, Olivier Noblecourt. La France comptait en 2016 quelque 8,8 millions de personnes pauvres, soit 14 % de la population, selon l’Insee. Ce taux monte à 19,8 % pour les moins de 18 ans. Sont considérés comme pauvres celles et ceux qui perçoivent moins de 1 026 euros par mois (pour une personne seule), c’est-à-dire moins de 60 % du revenu médian de la population.
Le montant de la « stratégie nationale » s’élèvera à huit milliards d’euros répartis sur quatre ans, jusqu’à la fin du quinquennat, et ses mesures sont déjà « entièrement financées », selon l’Élysée. Elle s’appuiera sur deux « piliers » : la prévention de la précarité, notamment chez les plus jeunes, et l’aide à la réinsertion vers l’emploi. Sur le premier volet, le plan prévoit notamment d’ouvrir davantage les crèches aux enfants de quartiers prioritaires ou défavorisés – via des bonus financiers aux collectivités –, de créer un fonds pour financer des petits-déjeuners dans les écoles prioritaires.
« L’accès à la cantine sera rendu plus universel en développant les repas à un euro », a précisé Emmanuel Macron. Pour les jeunes, l’obligation de formation passera de 16 à 18 ans. Des moyens supplémentaires seront attribués aux missions locales pour qu’elles repèrent les décrocheurs du système scolaire et leur proposent des formations. En outre, le dispositif « garantie jeune », pour les 16-25 ans les plus éloignés de l’emploi, sera étendu à « 500 000 jeunes avant la fin du quinquennat », contre 100 000 actuellement.