S’il est un sujet qui anime actuellement les parlottes dans les foyers et les marchés marocains, c’est bien le prix de l’huile d’olive qui, plombé par des périodes récurrentes de sécheresse, n’échappe pas à la spéculation, malgré les réglementations en vigueur. En effet, la parcimonie des pluies lors de ces deux dernières années a eu un impact néfaste sur les plantes oléicoles et leur rendement, tant et si bien que les intermédiaires promettent déjà que le prix d’un litre d’huile d’olive ne devrait pas être en-deçà de 100 dh dans certaines régions.
La récolte des olives, un produit fortement prisé au Maroc, commence à partir du mois d’octobre dans des régions comme Al Haouz, Souss, Chichaoua et Chiadma, pour s’étendre jusqu’au mois de décembre dans des régions plus au Nord comme Tadla, Fès-Saiss et Jbala. Avec plus de 65 % de la superficie arboricole nationale, la filière oléicole connaît aujourd’hui une baisse de production due aux conditions climatiques, notamment la sécheresse ayant sévi pendant deux campagnes consécutives, couplée aux chocs thermiques et à la grêle dans certaines régions. Mais ce qui nuit à l’un duit à l’autre : les conditions climatiques défavorables aux agriculteurs sont souvent mises à profit par les intermédiaires et les spéculateurs,
« ce mal nécessaire », selon le président de la Fédération interprofessionnelle marocaine de l’olive, Rachid Benali. Dans une déclaration à la MAP, M. Benali a soutenu que ce qui fait le « bonheur des spéculateurs”, c’est quand les producteurs n’arrivent pas à couvrir leurs charges et finissent par vendre leurs produits un peu plus tôt, avant la récolte et la maturité des fruits.
En vue de valoriser la production nationale et assurer l’approvisionnement prioritaire du marché national, l’exportation des olives et produits dérivés est désormais soumise à restriction, au grand bonheur des amateurs locaux du bon cru de l’huile d’olive.
« Le gouvernement a décidé de soumettre à licence l’exportation des olives à l’état frais ou réfrigéré, les olives transformées, l’huile d’olive et l’huile de grignons d’olives », a expliqué à la mi-octobre le ministère de l’Agriculture, de la Pêche Maritime du Développement Rural et des Eaux et Forêts. Destinée à stabiliser les prix à la consommation à des niveaux normaux, assurer la viabilité et la pérennité de la filière oléicole et à contribuer à la sécurité alimentaire du citoyen marocain, cette mesure interdit l’export, sauf sur autorisation, et demeure valable jusqu’au 31 décembre 2024.
Pour M. Benali, les prix d’aujourd’hui restent “assez raisonnables” comparés à ceux en cours dans le pourtour méditerranéen, du fait que la production prévisionnelle de l’huile d’olive à l’échelle mondiale est fortement impactée par des conditions climatiques extrêmes, notamment, chez les pays méditerranéens. Selon lui, tout porte donc à croire que la mesure sur les restrictions d’exportation prise par l’Exécutif aura « un effet psychologique immédiat” et contraindra spéculateurs et intermédiaires à « réfléchir mûrement avant de décider de stocker la marchandise pour espérer la revendre plus tard à des prix élevés ». Par conséquent, « le prix de l’huile d’olive devrait plutôt varier entre 80 et 90 dirhams », a-t-il assuré, soutenant que les prix, qui ont monté dans certaines régions pour atteindre les 100 dirhams en début de campagne, vont finir par « se stabiliser et revenir à leur niveau normal ».
La production prévisionnelle des olives (estimée à 1,07 million de tonnes au titre de l’automne 2023), sur la base des prix en cours permettra, d’après le ministère de l’Agriculture, de générer un chiffre d’affaires en amont estimé à 7,4 milliards de dirhams, soit une augmentation de 10% par rapport à l’automne 2022. La filière oléicole, qui fait partie de la stratégie Génération Green (2030), s’est fixé, entre autres objectifs, d’atteindre 1,4 million d’ha, contre 1,1 million en 2020, de réhabiliter les plantations sur une superficie de 100.000 ha et d’arriver à une production de 3,5 millions de tonnes.