Le Liban face à une grave crise politique

Le Liban face à une grave crise politique
La démission, mercredi 12 janvier, de onze ministres du gouvernement Hariri, dont dix membres de la coalition menée par le Hezbollah, plonge de nouveau le Liban dans une période de tension politique. Depuis 2008, et l’accord de Doha entre la majorité et l’opposition, le pays n’avait jamais connu une crise aussi grave.

Le bloc du 8-Mars, composé des partis chiites Amal et Hezbollah et des partisans de l’ex-général chrétien Michel Aoun, attend depuis plusieurs semaines que le premier ministre, Saad Hariri, se démarque du Tribunal spécial pour le Liban. Ce tribunal, qui doit faire la lumière sur l’assassinat de Rafic Hariri en février 2005, doit lancer ces prochains jours des accusations qui pourraient viser des responsables du Hezbollah.

L’existence de ce tribunal est un sujet de friction entre les deux principaux blocs de la politique libanaise. D’un côté, la coalition du 8-Mars, de l’autre celle dite du 14-Mars, composée des sunnites du Courant du futur, de Saad Hariri et de plusieurs partis chrétiens. Les positions des deux camps sur le sujet semblent inconciliables. Une médiation syro-saoudienne a échoué cette semaine, sous pression de Washington, assure le bloc du 8-Mars.

Le moment de l’annonce de la démission des ministres, en plein entretien entre Saad Hariri et Barack Obama, ne doit rien au hasard. Si ces départs étaient prévisibles depuis plusieurs jours, ce tempo est un moyen d’envoyer un signal à l’administration américaine. Le Hezbollah et les partisans de Michel Aoun accusent justement Saad Hariri de prendre ses ordres à Washington. Le 8-Mars "veut surtout que cette annonce soit une claque pour les Etats-Unis", affirme Moustapha Allouch, membre du conseil politique du mouvement de M. Hariri.

LE HEZBOLLAH SUPÉRIEUR MILITAIREMENT

Selon Hilal Khashan, professeur de sciences politiques à l’université de Beyrouth, interrogé par Reuters, "il y a peu de chances de voir un nouveau gouvernement constitué dans un avenir proche". Le politologue juge que des manifestations sont probables même s’il n’envisage pas de voir le Hezbollah descendre dans les rues de Beyrouth avec des armes, comme cela avait été le cas en mai 2008 lorsque le mouvement avait protesté contre les mesures du gouvernement à son encontre.
"La question est effectivement de savoir si la tension va rester à un niveau politique, où si elle va se traduire par des violences", analyse Owen Benett Jones, le correspondant de la BBC à Beyrouth. "Nous sommes encore très loin d’une guerre civile", tempère le politologue Joseph Bahout, interrogé par le site de L’Express. "Nous entrons maintenant dans une période de latence institutionnelle. Il risque d’y avoir des tensions politiques, et peut-être quelques dérapages. Mais aucun des partis en présence ne souhaite en passer par la violence."

La puissance militaire du Hezbollah au Liban est largement supérieure à celle des autres forces en présence. Le parti chiite en a fait la démonstration, en mai 2008, en s’imposant militairement dans l’ouest de Beyrouth et dans la montagne du Chouf.

En tout état de cause, le Liban va entrer dans une nouvelle période d’incertitude. "L’entrée dans l’inconnu", titrait ainsi Al-Akhbar, quotidien proche de l’opposition. L’éditorialiste de L’Orient-Le Jour, quotidien francophone proche de la majorité, ne dit pas autre chose, en qualifiant la situation de "saut dans l’inconnu".

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