Le Conseil d’Etat confirme la dissolution de BarakaCity et la fermeture de la mosquée de Pantin

Le Conseil d’Etat a confirmé mercredi la dissolution de l’ONG BarakaCity et la fermeture temporaire de la mosquée de Pantin, estimant comme le gouvernement qu’elles avaient diffusé des messages incitant à la haine voire à des actes terroristes.

Les avocats de l’ONG et de la mosquée ont dénoncé des décisions « injustes », accusant la plus haute juridiction administrative d’avoir suivi « sans sourciller » les arguments de l’Etat alors que celui-ci n’a selon eux apporté « aucune preuve » de leur proximité avec l’islamisme radical.

Le gouvernement avait ordonné la fermeture pour six mois de la mosquée de Pantin (Seine-Saint-Denis) le 21 octobre et dissout une semaine plus tard BarakaCity à la suite de l’assassinat du professeur Samuel Paty par un jeune islamiste radicalisé.

La mosquée de Pantin s’est retrouvée dans la tourmente pour avoir diffusé, le 9 octobre, la vidéo d’un père d’élève du collège de Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines) indigné après un cours sur la liberté d’expression de M. Paty qui y avait montré les caricatures de Mahomet à ses élèves. Cette vidéo avait été à l’origine de l’engrenage qui a conduit à l’assassinat du professeur d’histoire-géographie le 16 octobre.

La Fédération musulmane de Pantin, qui assure la gestion du lieu de culte, avait alors saisi le Conseil d’Etat. Lors de l’audience lundi, son président M’hammed Henniche avait estimé avoir donné des « gages » afin d’obtenir une réouverture plus rapide.

Mais le juge des référés du Conseil d’Etat a notamment jugé que « les propos tenus par les responsables de la Grande mosquée de Pantin et les idées ou théories diffusées en son sein constituent une provocation, en lien avec le risque de commission d’actes de terrorisme, à la violence, à la haine ou à la discrimination », justifiant sa fermeture administrative.

Il a toutefois précisé que la fédération pourra demander sa réouverture « lorsqu’elle estimera avoir pris les mesures » permettant d’éviter de nouveaux « dysfonctionnements ».

Les avocats de la fédération, William Bourdon et Vincent Brengarth, se sont dits stupéfaits d’entendre que « la mosquée serait devenue un lieu de rassemblement » pour la « mouvance islamique radicale » alors qu’elle avait jusque-là toujours « été érigée en exemple par les pouvoirs publics ». Ils ont également déploré qu’il n’ait pas été tenu compte des « arguments et garanties apportés », parmi lesquelles le départ de l’imam.

Le conseil d’Etat avait examiné lundi les requêtes en référé de la mosquée de Pantin et de l’ONG BarakaCity, elle aussi défendue par Me Bourdon et Me Brengarth.

Il a également rejeté celle de BarakaCity, une décision saluée par le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin qui a estimé sur Twitter que l’ONG « banalisait les actes terroristes ».

Le gouvernement avait dissout cette organisation en l’accusant d' »inciter à la haine », de « justifier des actes terroristes » et d’avoir des liens avec « la mouvance islamiste radicale ».

Le gouvernement comme le Conseil d’Etat ont notamment épinglé les messages publiés sur les réseaux sociaux par le fondateur et président de BarakaCity, Idriss Sihamedi. Notamment un tweet où il dénonçait la republication de caricatures du prophète Mahomet par Charlie Hebdo: « Qu’Allah maudisse Charlie et enflamme leurs tombes à la chaleur du soleil !! »

Ces messages « peuvent être imputés à l’association elle-même et constituent des discours pouvant justifier une dissolution », a estimé le Conseil d’Etat.

L’ONG s’est aussitôt insurgée contre une décision « injuste », regrettant sur Twitter que le Conseil d’Etat ait été dans le sens du ministère de l’Intérieur « malgré la légèreté des arguments avancés » par ce dernier, et sans de soucier de l’avenir de ses 47 salariés et des « 2 millions » de démunis qui, selon elle, bénéficient de ses programmes dans le monde.

BarakaCity a ajouté que ses avocats allaient saisir la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) et précisé que son siège, actuellement dans l’Essonne, était en cours de déménagement à l’étranger. Elle avait évoqué dernièrement la possibilité de l’installer en Turquie.

Présent à l’audience lundi, Idriss Sihamedi avait nié toute radicalité, condamné le terrorisme et concédé des « tweets maladroits » sur Charlie Hebdo. Son association, populaire notamment chez des jeunes musulmans de région parisienne, avait fait l’objet ces dernières années d’une enquête approfondie des autorités pour financement du terrorisme, classée sans suite faute d’éléments probants.

L’ONG fait partie, avec le collectif « Cheikh Yassine » et le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF), des trois organisations dont le gouvernement a annoncé la dissolution depuis la mort de Samuel Paty.

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