L’Europe dope ses électrons verts au soleil marocain

Le consortium européen Transgreen soutient la production d’énergie solaire au Maghreb afin de l’importer vers le Vieux Continent.

L’Europe dope ses électrons verts au soleil marocain
Après le textile et l’automobile, c’est au tour de l’électricité verte d’être délocalisée. L’Europe s’apprête à importer des électrons verts en provenance du Maghreb richement doté en ensoleillement. Mais avant d’importer ces électrons, encore faut-il disposer de réseau pour le faire.

Telle est l’ambition du consortium Transgreen en gestation depuis plusieurs mois : développer des interconnexions électriques avec des pays du Maghreb, à commencer par le Maroc, rapporte samedi Libération .

Mercredi, l’Office national d’électricité marocain (ONE) a payé son ticket d’entrée – 200 000 euros – pour rejoindre les industriels européens membres de Transgreen : Alstom, Areva, EDF, Siemens, Soïtec…

"Le Maroc devient ainsi l’un des premiers partenaires maghrébins du consortium, mettant «son» soleil à la portée de l’Europe", souligne le journal.

Quotas. D’ici à 2020, poursuit Libération, l’Europe doit produire 20% d’énergies renouvelables. «Or, elle dispose d’un potentiel limité pour cela, c’est pourquoi elle va devenir championne de l’importation d’électricité renouvelable !» s’enthousiasme Antoine-Tristan Mocilnikar de la délégation interministérielle de l’Union pour la Méditerranée. «Transgreen met les moyens réglementaires nécessaires à la disposition des industriels qui veulent faire du business d’électrons verts.» Ces moyens tiennent en vingt lignes dans l’article 9 de la directive européenne Energie-climat. Celui-ci permet à des pays tiers d’exporter des électrons issus d’énergies renouvelables vers l’Europe et surtout, autorise les pays européens à comptabiliser ces importations dans leurs quotas.
C’est donc le soleil marocain, tunisien, égyptien, etc. qui permettra à l’Europe d’atteindre ses objectifs.

Selon le journal, "Pour les fondateurs de Transgreen, hors de question de parler de délocalisation énergétique. «Pour l’instant, les fermes solaires ne sont pas rentables. Et l’exportation est un moyen de créer de la rentabilité sur ce type de projets», souligne Philippe Lorec, à la direction générale de l’énergie et du climat au ministère de Borloo".

En clair, si le Maroc n’exporte pas au moins 30% de sa production au tarif européen, l’électricité solaire restera inabordable pour son marché. «L’énergie solaire coûte encore deux fois plus cher que les énergies conventionnelles», confirme Mustapha Bakkoury, président de l’Agence marocaine de l’énergie solaire, cité par le journal.

Dans le cadre de l’Union pour la Méditerranée, le Maroc s’est lancé dans un vaste plan solaire qui ambitionne de produire 6 gigawatts (GW) d’électricité renouvelable (dont 2 GW de solaire) pour un investissement de 6,2 milliards d’euros. Il a donc cruellement besoin d’investissements étrangers. En revendant son kilowattheure solaire 40 centimes d’euros sur le marché européen, contre 7 à 10 centimes au Maroc, le pays rentabilise ses investissements.

Pour l’ONE, le ralliement à Transgreen est donc essentiel. En plein développement, le pays voit sa consommation électrique exploser (+ 6,5% par an). «Chaque année, nous devons nous doter d’une capacité de production supplémentaire de 350 MW, l’équivalent de la consommation de Rabat», explique Abdellah Griech, directeur du département hydraulique et renouvelables de l’ONE.

"Le pays doit doubler sa capacité de production, actuellement de 6 GW, tous les dix ans. En 2015, une centrale solaire de 500 MW entrera en fonction à Ouarzazate. «C’est un défi pour nous qui ne disposons d’aucune énergie fossile», confirme Ali Fassi Fihri, le patron de l’ONE. Pour rassasier sa gloutonnerie énergétique, le Maroc importe 95% de ses énergies primaires et 18% de son électricité, principalement auprès de l’Espagne", souligne Libération.

Plongée dans le détroit de Gibraltar, une interconnexion de 1 400 MW relie les deux continents et balance des électrons nucléaires et éoliens espagnols, poursuit le journal, ajoutant que qu’il faudrait renforcer ce passage et développer d’autres interconnexions. Montant de l’investissement : un milliard d’euros.

«Le Maroc est appelé à devenir une grande zone de transit entre les deux continents», prédit André Merlin, président de RTE (réseau de transport d’électricité) qui a invité des journalistes au Maroc cette semaine pour assister au ralliement de l’ONE à Transgreen.

A terme, le royaume n’exclut pas d’intégrer le nucléaire dans son bouquet énergétique, note le journal. «Nous ne pouvons pas tout miser sur les renouvelables, précise Amina Benkhadra, la ministre marocaine de l’Energie. Nous n’avons pas encore décidé quand, mais le nucléaire doit faire partie du mix énergétique marocain.»

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