Le trader qui a fait paniquer Wall Street (Le Figaro)
La Bourse new-yorkaise a vécu jeudi un krach boursier vertigineux pendant une vingtaine de minutes. Selon les autorités boursières, une série d’erreurs expliquerait le décrochage «délirant» de certains titres. Un trader aurait confondu millions et milliards.
Mais il se trompe et tape «milliards» au lieu de «millions», et clique sur la valeur Procter & Gamble, un géant des produits de consommation aux Etats-Unis. En quelques nano-secondes, les actions chutent… jusqu’à 37% !
Conséquence : le Dow Jones, le principal indice boursier américain, sur lequel est coté Procter & Gamble, subit de plein fouet ces pertes, et dégringole en sept minutes de 9 %. Du jamais vu depuis le krach boursier de 1987 !
Dans ce laps de temps, ce sont 1.000 milliards de dollars capitalisation boursière qui s’envolent.Le Dow Jones casse littéralement les 10.000 points et touche un point bas à 9.873 points peu avant 21 heures (heure de Paris), alors qu’il avait atteint 10.880 points dans les premiers échanges, vers 16 heures.
Dans la spirale infernale, certaines actions y ont laissé des plumes, comme l’énorme groupe 3M, qui a décroché de 15 %. Que dire d’Accenture, dont le cours en Bourse a implosé, de 99,9 %, revenant de 41 dollars à quelques cents.
Les patrons de ces grands groupes ont dû vivre des minutes intenses. Leur pouls a pu retrouver des niveaux décents une vingtaine de minutes après, quand les cours sont, eux aussi, remontés à la normale.
«Une activité inhabituelle», ont d’emblée jugé les régulateurs américains boursiers. Digne d’un krach boursier. Une enquête s’ouvre.
Citigroup visé, transactions erronées sur plusieurs titres
En réalité, cette erreur humaine n’est pas confirmée. C’est CNBC qui a répandu une information selon laquelle ce serait un trader de la banque Citigroup qui aurait selon plusieurs sources anonymes «confondu les millions et les milliards». Selon Fox Business News, le trader aurait voulu vendre à terme 16 millions de dollars sur le S&P 500 (c’est-à-dire parier sur la baisse de l’indice) mais a passé son ordre sur Procter & Gamble pour 16 milliards de dollars,indique un des journalistes sur Twitter.
Interrogé, Citigroup n’a pas confirmé dans l’immédiat. Un porte-parole a dit que la banque enquêtait sur cette rumeur, mais qu’elle n’avait pour l’heure pas de preuve qu’une transaction erronée ait été passée. «Nous ne savons pas ce qu’il s’est passé (entre 14h40 et 15h00, heure de New York, NDRL), nous étudions le problème avec le Nasdaq et les autres grands marchés électroniques», a-t-il précisé.
Avant l’ouverture de Wall Street, ce vendredi, la banque a démenti que l’erreur de trading venait de sa part.
Transactions annulées
Quoiqu’il en soit, vers 14h40 heure de New York, le Dow Jones recule soudainement, ce qui entraîne des réactions de ventes en chaîne déclenchées par les automates d’ordre, ce qui plombe encore un peu plus l’indice. Quelques minutes plus tard, tout le monde admet qu’il y a eu une erreur, technique ou humaine – peu importe – et le mouvement de panique a laissé place à l’apaisement.
De son côté, le marché Nasdaq – celui qui regroupe les 100 plus grosses entreprises cotées hormis les financières – a indiqué qu’il enquêtait sur d’éventuelles transactions erronées concernant plusieurs titres.
En attendant, le groupe a annoncé qu’il allait «annuler toutes les transactions effectuées entre 14h40 et 15 heures à des prix plus élevés, ou moins élevés de 60% du dernier cours enregistré pour ce titre».
Des équipements informatiques hors-réalité
Ces écarts de cours relancent forcément le débat sur les systèmes informatiques de trading à haute fréquence (High Frequency), qui consiste à effectuer des opérations automatiquement à la vitesse de la lumière !
Ainsi, telle que la planète finance se présente, ces ordres passés à vitesse grand V représentent 60 à 70% de la totalité des transactions dans le monde. Les traders utilisent une stratégie qui consiste à tirer parti des différences dans la vitesse de cotation des cours sur les marchés.
«Les traders ont le droit de faire ça, la régulation ne leur interdit pas. Le problème qu’il y a eu hier n’est pas étonnant. Ce qui est consternant, c’est l’absence de contrôle qui existe dans la finance», s’est insurgé Marc Fiorentino sur les ondes de BFM vendredi matin.
Pourtant, depuis la faillite de Lehman Brothers en septembre 2008, la question de la régulation financière semble être au coeur des préoccupations des politiques. Sans réelle concrétisation jusque-là.