« Spotlight » et « The Revenant » grands gagnants des Oscars
« Spotlight », sur les prêtres pédophiles, a été sacré meilleur film aux Oscars dimanche tandis que le western sombre « The Revenant » a fait entrer son réalisateur Alejandro Iñarritu dans la légende d’Hollywood et offert à Leonardo DiCaprio sa première statuette.
"Spotlight", de Tom McCarthy, était servi par un remarquable ensemble d’acteurs dont Mark Ruffalo, Rachel McAdams ou Michael Keaton, incarnant l’équipe de journalistes du Boston Globe qui ont révélé le scandale des abus sexuels dans l’Eglise.
"Ce film a donné une voix aux victimes. Cet Oscar amplifie leur voix et nous espérons que ce choeur va résonner jusqu’au Vatican", a lancé le coproducteur Michael Sugar sur la scène du Dolby Theatre.
"Pape François, il est temps de protéger les enfants et de restaurer la foi" dans l’Eglise catholique, a-t-il ajouté, lors de cette cérémonie retransmise dans le monde entier.
Leonardo DiCaprio, l’une des plus grandes stars d’Hollywood, a quant à lui reçu son premier Oscar pour son interprétation d’un trappeur en quête de vengeance dans "The Revenant".
L’acteur de 41 ans a décrit ce tournage dans le Grand Nord canadien et la Patagonie comme l’une des plus difficiles expériences de sa carrière.
Pour ce rôle, "Leo" a escaladé des montagnes avec de lourdes fourrures sur le dos, s’est baigné dans des rivières glacées et a dévoré du foie de bison cru.
Après une ovation au Dolby Theatre, ce militant écologique a appelé une nouvelle fois à agir contre le changement climatique, "menace la plus urgente pesant sur notre espèce".
Il a rendu hommage à ses parents, à Martin Scorsese dont il est l’acteur fétiche, et à Iñarritu: "tu as forgé ta place dans l’Histoire".
Ce dernier, déjà primé l’an dernier pour "Birdman", est seulement le troisième metteur en scène à réussir un tel doublé, après les mythiques John Ford (1941 et 1942) et Joseph L. Mankiewicz (1950 et 1951).
– Les Mexicains au sommet –
Preuve de l’ascension des Mexicains au firmament d’Hollywood, son compatriote Emmanuel Lubezki est le premier directeur de la photographie à enchaîner trois Oscars pour avoir capté la beauté des paysages perdus et la brutalité du corps-à-corps de DiCaprio avec un grizzli.
Chez les femmes, Brie Larson, bouleversante mère captive dans "Room", et la Suédoise Alicia Vikander, épouse-courage de la pionnière des transgenres Lili Elbe dans "The Danish Girl" sont reparties respectivement avec les statuettes de meilleur actrice et meilleur second rôle féminin.
En revanche le roi des films d’action Sylvester Stallone, finaliste pour sa septième reprise du boxeur Rocky Balboa, a été évincé par le Britannique Mark Rylance, agent russe dans "Le Pont des Espions".
La polémique sur le manque de diversité à Hollywood a été le fil rouge de la soirée.
Pour la deuxième année de suite, les 20 acteurs candidats aux Oscars étaient blancs.
Le présentateur noir Chris Rock a parsemé la cérémonie de sketches évoquant la frustration des Afro-américains face à leur difficulté à obtenir des rôles, interrogeant frontalement: "Est-ce qu’Hollywood est raciste?".
"Si vous voulez des acteurs noirs chaque année aux Oscars, il faut créer des catégories pour les Noirs", a-t-il plaisanté, sarcastique.Il a martelé: "Nous. Voulons. Des opportunités".
La présidente de l’Académie des Oscars, Cheryl Boone Isaacs, elle-même Afro-américaine, a appelé "à agir" pour plus d’ouverture aux femmes et minorités.
Le chanteur Sam Smith, oscarisé pour la chanson du dernier James Bond, a estimé que "c’est important de parler de ces questions (…), il y a tant de choses qui doivent changer".
Après avoir annoncé qu’il était probablement le premier homosexuel déclaré à gagner un Oscar – doublant Lady Gaga – il a appris en salle de presse qu’il s’était trompé, laissant échapper un juron… et déclenchant les rires.
La chanteuse Lady Gaga a créé un moment fort de la soirée, interprétant "Til it happens to you", entourée de victimes d’abus sexuels sur les campus universitaires. Beaucoup étaient en larmes, sur scène comme dans le public.
Autre séquence émotion: l’Oscar de l’Italien Ennio Morricone pour la musique des "Huit Salopards" de Quentin Tarantino. Les yeux embués, le légendaire compositeur de musiques de western de 87 ans a été ovationné.
Autre fait marquant, Disney a empoché un quatrième Oscar d’affilée pour "Vice-Versa".
Le crépusculaire "Fils de Saul", premier long-métrage du Hongrois Laszlo Nemes, sur les Juifs forcés de travailler dans les chambres à gaz, a été sacré meilleur film étranger, doublant le franco-turc "Mustang" qui a triomphé aux Césars en France.