Les islamistes du Maghreb dans le piège du Polisario

C’est une situation qui étonne et détonne. Des partis islamistes au Maghreb expriment une empathie ouverte à l’égard des séparatistes du Polisario. La posture est d’autant plus surprenante qu’elle vient de structures politiques appartenant à une mouvance idéologique qui prône dans leur ADN une forme de fédéralisme et de destruction de frontières nationales à travers le substrat historique de l’unité de la Oumma.

Qu’il s’agisse des islamistes algériens du MSP menées par Abderrazak Mokri, des Tunisiens d’Annahda de Rached Ghanouchi ou des Mauritaniens de Tawasol, ils se sont toujours positionnés en sympathie assumée envers les séparatistes du Polisario, comme si cette cause faisait brusquement partie de leur stratégie politique et de leurs programmes de conquête de pouvoir.

Aussi bien l’algérien Abderrazak Mokri que le tunisien Rached Ghanouchi, leurs dernières sorties sur le sujet ont comblé d’aise l’institution militaires algérienne qui cherche à faire feu de tout bois sur le Maroc, y compris quand il s’agit d’instrumentaliser la fibre islamiste qu’elle a prétendu combattre pendant la décennie noire pour se maintenir au pouvoir.

Dans tous les cas, le positionnent de la mouvance islamiste est source d’interrogations aussi bien de la part des autorités marocaines qui y voient une forme de coagulation politique à l’antagonisme assumé à l’égard du Maroc que pour les islamistes marocains qui voient leurs alliés naturels prendre un chemin aussi menaçant pour les intérêts de leur pays.

Pour atteindre une indispensable clarification, les islamistes marocains dont une partie participent largement au pouvoir au Maroc se doivent de revoir leurs alliances et d’exiger de leurs « frères » des clarifications.

Il y a sans doute plusieurs raisons qui expliquent que la galaxie des islamistes maghrébins ait des yeux de Chimène envers les séparatistes du Polisario. Officiellement pour les islamistes algériens du MSP et tunisiens d’Annahda, le rapprochement entre le Maroc et Israël serait la raison de ce soutien et de cette ouverture à l’égard du Polisario. Mais en réalité ce rapprochement n’a servi que de prétexte pour cette mouvance pour mener une campagne contre le Maroc et ses institutions. Ces partis islamistes considèrent qu’attaquer le Maroc sur son unité participe à l’affaiblir.

L’autre raison beaucoup plus large et plus idéologique est à trouver dans les choix stratégiques de l’islam politique, aussi bien dans sa version Frères musulmans que dans celle de l’islam chiite militant d’obédience iranienne.

D’abord la confrérie des frères musulmans, qu’elle soit sous parrainage turc ou qatari, envoie des signaux confus sur cette question. Si ce n’est un soutien ferme du moins une sympathie ouverte, tel est le message qui domine la position de de cette mouvance à l’égard des séparatistes du Polisario. Les frères musulmans dans leur ensemble voient dans ce combat séparatiste une occasion d’affaiblir la gouvernance régionale en y insufflant de la tension, l’instabilité le chaos, la seule manière d’accéder au pouvoir sur des ruines fumantes. Cette stratégie de la terre brûlée a déjà été tentée avec un succès relatif lors des fameux « printemps arabes » lorsque le mouvement islamiste avait chevauché la colère et la contestation des populations pour parvenir au pouvoir comme c’était le cas à Tunis ou au Caire.

L’autre versant de l’islam politique produit par le régime iranien affiche clairement son animosité à l’égard du Maroc. Comme en témoigne la présence d’instructeurs militaires du Hezbollah libanais auprès des séparatistes du Polisario pour leur apprendre l’art de la guérilla et du terrorisme ciblé. Dans cette partition, l’Iran joue une gigantesque partie d’échec où le Polisario prend la position d’un minuscule pion qui sert les intérêts d’un agenda beaucoup plus ambitieux. Le grand bras de fer entre Rabat et Téhéran a pour objet ce soutien militaire iranien par Hezbollah interposé au Polisario.

Une autre raison et pas des moindres peut expliquer cette empathie de ces mouvements islamistes envers les séparatistes du Polisario et de leurs milices armées, il s’agit de la facilité avec laquelle des passerelles ont été établies entre ces mouvement politiques et les organisations qui prônent la terreur au nom de l’islam comme Àl Qaeda ou Daesh dans cette région.

L’exemple d’un personnage comme Adnan Abou Walid al-Sahraoui, ancien membre du Polisario, devenu dirigeant de l’organisation terroriste État islamique dans le Grand Sahara (EI-GS), illustre ces passages et ces collaborations qui commencent par un « militantisme » politique pour se terminer par une pratique terroriste.

 

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