Dans une résolution sans valeur contraignante adoptée à main levée, les eurodéputés ont "condamné vivement" jeudi les récentes "arrestations arbitraires", incarcérations et "attaques" de journalistes, militants et manifestants en Algérie, théâtre depuis février d’un mouvement de contestation populaire inédit.
Ils réclament "qu’une solution soit trouvée" à la crise actuelle, "sur la base d’un processus politique pacifique et ouvert", alors que les contestataires algériens rejettent fermement la tenue le 12 décembre d’une présidentielle organisée, pour sortir le pays de l’impasse, par un pouvoir dont ils exigent le départ.
"Le Parlement européen, sur instigation d’un groupe hétéroclite de députés partisans, a pris l’outrecuidante liberté de statuer sur le processus politique en cours dans notre pays, au moment précis où les Algériens s’apprêtent à élire, en toute démocratie et transparence, un nouveau président", s’est insurgé le ministère algérien des Affaires étrangères dans un communiqué.
"L’Algérie condamne et rejette dans le fond et dans la forme cette immixtion flagrante dans ses affaires internes et se réserve le droit de procéder à un examen général et attentif de ses relations avec l’ensemble des institutions européennes", a ajouté le ministère.
Alger s’est insurgé contre le fait que les eurodéputés "se sont même arrogés, toute honte bue, un droit d’exiger du Parlement algérien de modifier des lois que nos députés ont souverainement adoptées".
Dans sa résolution, le PE demande au gouvernement algérien de réviser une loi sur les réunions et manifestations, adoptée en 1991 alors que l’état de siège était en vigueur en Algérie, et "s’inquiète" qu’un décret de 2001 interdisant toute manifestation dans la capitale soit toujours en vigueur.
Les parlementaires demandent également la révision d’une loi restrictive sur les associations que des ONG comme Amnesty International estiment "non conforme aux normes internationales".
"Par cette démarche, le Parlement européen a démontré son mépris, non seulement des institutions algériennes mais également des mécanismes bilatéraux de consultation prévus par l’accord d’association" entre l’Algérie et l’Union européenne, selon le ministère.
L’Assemblée nationale populaire (APN, chambre basse) algérienne a dénoncé "une ingérence flagrante dans les affaires internes (du pays) et une provocation à l’égard du peuple algérien", a rapporté l’agence de presse officielle APS.
Mercredi, le général Ahmed Gaïd Salah, homme fort de l’Algérie depuis la démission d’Abdelaziz Bouteflika en avril, avait affirmé que son pays n’acceptait "aucune ingérence ou diktat (…) de quiconque".