L’ampleur de la récession en France dépendra largement du rebond de la consommation après le confinement, selon l’OFCE, qui a estimé lundi à 120 milliards d’euros les pertes sur une durée de huit semaines.
Le produit intérieur brut (PIB) diminuera de près d’un tiers (32%) sur la seule période comprise entre le 17 mars et le 11 mai, précise l’Observatoire français des conjonctures économiques dans une étude sur les effets économiques du Covid-19 et des mesures de confinement en France.
L’OFCE ne fait pas de prévision pour l’ensemble de 2020 à ce stade, les incertitudes étant encore trop grandes sur les modalités de sortie de crise.
Le gouvernement a prévu de son côté que le PIB de la France reculerait sur l’ensemble de l’année 2020 de 8% sous l’effet du choc économique provoqué par le coronavirus, qui ne sera pas limité aux huit semaines de confinement.
Durant ces huit semaines, les Français auront accumulé une « épargne forcée » de 55 milliards d’euros, ce qui représente 230 euros par ménage et par semaine, d’après l’OFCE.
Mais ceux qui épargnent ne sont souvent pas ceux qui voient leur revenus baisser. Et alors que 9,6 millions de salariés sont au chômage partiel, les pertes de revenu des ménages sont évaluées à 11 milliards d’euros, en y incluant 2 milliards pour les entrepreneurs individuels.
« On voit le taux d’épargne augmenter énormément pendant cette crise », a déclaré lors d’une visioconférence le président de l’OFCE, Xavier Ragot. Une partie vient du fait que les Français « ne peuvent pas consommer, une autre partie est une épargne de précaution, et on a du mal à voir la différence entre les deux au jour d’aujourd’hui ».
Or au moment du déconfinement, « si la consommation reste atone, alors la récession sera très profonde », alors qu’elle pourrait être « bien moindre » si les Français rattrapent leurs dépenses, prévient M. Ragot.
crédits d’impôt pour les entreprises
L’OFCE prévoit aussi une « contribution de huit semaines de confinement à l’évolution du déficit public » de 65 milliards d’euros.
Dans l’hypothèse peu vraisemblable où l’intégralité de cette épargne était consommée, ce ne serait toutefois plus que 20 milliards d’euros.
Mais face aux incertitudes sur la sortie de crise, « l’épargne accumulée pourrait ne pas être consommée complètement et rapidement », relève l’étude.
Aussi, si l’activité reste réduite cet été notamment dans l’hébergement et la restauration, « les restrictions qui persisteraient, notamment sur les mouvements de personnes, pourraient avoir des impacts sectoriels massifs » et il pourrait y avoir des « ajustements coûteux en chômage », prévient l’OFCE.
Deuxième point clé pour la reprise: l’état du tissu productif en sortie de crise. « La chute d’activité peut entraîner des faillites, des retards de paiement, des retards de production », relève M. Ragot.
Les entreprises, hors services non marchands et immobilier, voient leur activité chuter de 42% durant le confinement.
« On a une baisse de plus de 50% de l’investissement », a précisé Mathieu Plane, économiste de l’observatoire, car réduire ce poste de dépenses, « c’est le seul moyen aujourd’hui pour les entreprises de rétablir leur capacité de financement ».
Le montant des pertes de revenu pour les entreprises sur huit semaines est de 42 milliards d’euros, a calculé l’OFCE, qui propose à l’Etat de compenser les actifs non utilisés (avion, local de restaurant…) par des crédits d’impôts qui pourraient atteindre 17 milliards.
Les pertes de revenu disponible brut (RDB) pour l’ensemble des acteurs économiques, qui ne tiennent pas compte contrairement au PIB de l’allègement de la facture pétrolière, sont évaluées par l’OFCE à 125 milliards.
Les administrations publiques en supportent la plus grosse part, avec 72 milliards, en raison de pertes de rentrées fiscales mais aussi des mesures de soutien à l’économie qui s’élèveront au total à 110 milliards d’euros, selon le deuxième projet de loi de finances rectificative actuellement en discussion au parlement.