Boris Johnson avait dû faire son mea culpa à la chambre des Communes et défendre son bilan à la tête du gouvernement pour resserrer les rangs de son parti et calmer, momentanément, les ardeurs de l’opposition travailliste.
L’émergence du conflit russo-ukrainien a participé à l’apaisement de la fronde autour du leader conservateur, détournant l’attention des médias et offrant à Boris Johnson l’occasion de réaffirmer le leadership du Royaume-Uni en Occident.
Mais alors que Johnson et son gouvernement multipliaient les contacts avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky, les aides militaires à Kiev et les sanctions contre la Russie, Scotland Yard poursuivait l’examen des centaines de documents en sa possession en lien avec les infractions présumées des règles anti-Covid à Downing Street.
La sanction est finalement tombée mardi, lorsque la police a condamné à une amende le Chef du gouvernement, sa femme Carrie Johnson et son ministre des Finances, Rishi Sunak. Selon les conclusions de l’enquête, les trois ont participé à un pot d’anniversaire le 19 juin 2020.
Au total, la police a indiqué avoir émis plus de 50 amendes pour infractions aux règles anti-Covid dans cette affaire, sans préciser les noms des destinataires.
Jouant la carte de la transparence totale cette fois, après les erreurs de communication en début de crise qui ont valu à Johnson des accusations de mensonge, ce sont les services du premier ministre qui ont annoncé la nouvelle peu de temps avant la diffusion d’un message télévisé.
Johnson, qui détient désormais »le record » de premier PM reconnu coupable d’une effraction de la loi durant son mandat, a renouvelé ses excuses aux Britanniques, concédant « qu’ils sont en droit de s’attendre à mieux ».
Tout en affirmant « comprendre la colère du public », Johnson a rejeté les appels à la démission lancés par le chef des travaillistes Keir Starmer et la Première ministre indépendantiste écossaise Nicola Sturgeon.
« Je veux maintenant continuer et remplir le mandat qui est le mien », a souligné Johnson, expliquant vouloir poursuivre son travail sur la crise en Ukraine et « s’attaquer aux problèmes auxquels le pays doit faire face en ce moment ».
Alors que la réaction de Boris Johnson à la mise à l’amende a été presque aussi rapide que celle de ses détracteurs, celle du Chancelier de l’Échiquier s’est fait quelque peu attendre.
En effet, Sunak, qui durant un temps était vu comme le successeur potentiel de Boris Johnson, avait déjà du grain à moudre ; sa situation fiscale et le statut avantageux de sa richissime épouse ayant fait la Une de la presse durant la semaine écoulée.
Après sept heures, utilisés selon The Times à étudier ses options avec ses collaborateurs et ses alliés, celui qui il y a encore un mois était la jeune coqueluche des conservateurs a fini par sortir de son silence.
« Je regrette profondément la frustration et la colère causées et je suis désolé », a-t-il dit dans une courte déclaration.
« Comme le Premier ministre, je me concentre sur les résultats pour le peuple britannique en cette période difficile », a-t-il assuré, écartant l’éventualité d’une démission.
Les rangs des conservateurs ont semblé plus résilients face à cet épisode que durant le début du scandale et les vacances parlementaires ont permis à Johnson et à son gouvernement, qui a volé à son secours via de nombreux tweets de soutien, de se dérober aux pics des députés de l’opposition.
Pas de coup de Trafalgar donc, si ce n’est la démission du sous secrétaire d’État à la justice, David Wolfson, qui a estimé que « l’échelle, le contexte et la nature » des violations des règles anti-Covid au sein du gouvernement étaient incompatibles avec l’État de droit.
Mais la réputation de Boris Johnson en particulier et des Tories en général est indéniablement atteinte et leur popularité dans les sondages d’opinion est au plus bas.
De plus, même si Johnson semble être en mesure de traverser cet orage, il est sans doute conscient que le répit sera de courte durée. La réouverture du parlement après le weekend de Pâques et, surtout, le fait que l’enquête policière concerne plusieurs autres fêtes risquent d’apporter de l’eau au moulin de ses adversaires.
La fête d’anniversaire pour laquelle M. Johnson a été condamné est de fait celle qui peut lui être le moins dommageable, étant donné qu’il s’agissait d’un événement surprise organisé à son attention et lors duquel il affirme n’être resté que 10mn avant de rejoindre son travail.
Si la police métropolitaine réussit à établir sa présence lors d’autres rassemblements, le même schéma risque de se répéter, usant jusqu’à la corde la résilience du leader conservateur.