Voici les principales controverses qui ont rythmé son long règne:
L’unité de la rébellion qui a combattu les colons britanniques n’a pas fait long feu. Dès 1982, Robert Mugabe règle ses comptes avec son principal frère d’armes devenu rival, Joshua Nkomo.
Composée en majorité de soldats d’ethnie shona, celle du nouveau Premier ministre, la 5e brigade de l’armée du nouveau Zimbabwe, entraînée par la Corée du Nord, lance l’offensive contre les "dissidents" de la province du Matabeleland (ouest).
Bastonnades, exécutions de masses, récoltes et villages brûlés, l’opération baptisée Gukurahandi, littéralement "la pluie qui disperse la paille avant la pluie de printemps" en langue shona, tourne au massacre de masse.
Selon les sources, jusqu’à 20.000 civils sont tués, pour la plupart d’ethnie ndebele comme Joshua Nkomo.
"Ne pleurez pas si vos proches sont tués", justifiera alors Robert Mugabe, "quand des hommes et des femmes nourrissent les dissidents, nous les débusquons et nous les massacrons".
En 2000, des hommes armés de machettes commencent à envahir les fermes des paysans blancs dans tout le Zimbabwe.
Nourris, transportés et payés par le gouvernement, ces groupes, officiellement présentés comme des vétérans de la guerre d’indépendance, s’installent dans les exploitations et en chassent les propriétaires. Certains sont blessés, d’autres tués.
Leurs recours devant la justice zimbabwéenne sont systématiquement rejetés. Robert Mugabe défend ces expropriations sauvages au nom des droits de la majorité noire.
Les conséquences du mouvement sont terribles.
Faute de moyens et par manque de formation de leurs nouveaux occupants, de nombreuses fermes sont laissées à l’abandon, les récoltes chutent et le Zimbabwe, jadis considéré comme le grenier à blé de l’Afrique australe, connaît ses premières famines.
L’effondrement du secteur agricole fait plonger le pays dans une crise économique à laquelle le régime réagit en faisant tourner frénétiquement sa planche à billets.
La valeur du dollar zimbabwéen dégringole et l’inflation s’envole jusqu’à des taux délirants de 500 milliards de pour cents. Dans les boulangeries, le tout nouveau billet de 100.000 millions de dollars suffit à peine à acheter une miche de pain…
En 2009, le gouvernement est contraint d’abandonner son dollar pour le billet vert américain mais le pays est ruiné, l’épargne s’est volatilisée, les investisseurs étrangers ont pris la fuite et des millions de Zimbabwéens la route de l’exil.
Aujourd’hui encore, le pays reste profondément affecté par cette période. Près de 90% de la population active est officiellement au chômage et 80% du budget de l’Etat sert à payer, souvent avec retard, ses fonctionnaires.
Pour pallier la pénurie de dollars américains, le régime a émis l’an dernier des "billets d’obligation" mais cette monnaie qui ne dit pas son nom remporte un faible succès et a ravivé dans la population le spectre de l’hyperinflation des années 2000.
Depuis 1980, pas un seul scrutin n’a échappé aux accusations de fraude lancées par l’opposition.
Non content de réprimer sévèrement la moindre forme de contestation de rue, Robert Mugabe est soupçonné d’avoir systématiquement bourré les urnes pour assurer ses réélections.
L’élection présidentielle de 2008 est un cas d’école. Le Mouvement pour un changement démocratique (MDC) proclame la victoire de son candidat Morgan Tsvangirai dès le premier tour, mais la commission électorale convoque les électeurs pour un second tour pour cause de résultats trop serrés.
La vague de violences déclenchée par le parti au pouvoir est telle – au moins 200 morts – que M. Tsvangirai préfère renoncer pour éviter un bain de sang. L’opposition fait officiellement son entrée au gouvernement mais M. Mugabe garde le contrôle du pouvoir.
En 2013, le chef de l’Etat est réélu pour un nouveau mandat et son parti décroche, sans surprise, la majorité absolue des sièges au Parlement au terme d’un scrutin dont tous les observateurs étrangers ont été soigneusement écartés.
Dans un rapport, l’ONG Human Rights Watch dénoncera la participation au scrutin d’électeurs fantômes et même de morts…
Fin 2017, à la suite d’un coup de force de l’armée soutenu par son parti, la Zanu-PF, le plus vieux chef de l’Etat en exercice de la planète à l’époque est alors contraint de démissionner. Il laisse un pays englué dans une profonde crise économique qui ne cesse aujourd’hui d’empirer.
Il a été remplacé à la tête du pays par son ancien vice-président, Emmerson Mnangagwa, qu’il avait limogé peu de temps auparavant.