Alassane Ouattara a prêté serment en mai 2011, sept mois après sa victoire à l’élection présidentielle que le sortant, Laurent Gbagbo, a refusé de reconnaître. Le président français Nicolas Sarkozy assistait à la cérémonie d’investiture.
La crise post-électorale ivoirienne a fait au moins 3.000 morts entre décembre et avril et n’a pris fin qu’après une offensive armée de milices venues du nord pro-Ouattara et des bombardements aériens de l’Opération des Nations unies en Cô te d’Ivoire (ONUCI) soutenue par la force Licorne française.
L’ex-président Gbagbo a été livré à la Cour pénale internationale (CPI) à La Haye pour crimes contre l’humanité après le scrutin de novembre, mais ses partisans accusent M. Ouattara de ne pas poursuivre réellement les auteurs d’exactions dans ses rangs, malgré sa volonté affichée de justice et de réconciliation nationale. Les enquêtes d’Amnesty International et Human Rights Watch ont conclu qu’au moins la moitié des 500 personnes massacrées fin mars 2011 à Duékoué (ouest) l’avaient été par des membres des forces pro-Ouattara, régulières ou non.
M. Ouattara assure de nouveau dans un entretien au journal "Le Monde" daté de jeudi que "ceux qui ont tué, de quelque bord qu’ils soient, seront jugés". La France, explique-t-on à l’Elysée, encourage le président ivoirien en ce sens pour que la paix et la sécurité reviennent dans tout le pays.
A Paris, explique M. Ouattara, "je viens d’abord remercier le président Sarkozy et son gouvernement pour l’intervention menée en avril sous mandat des Nations unies. Sans elle, il y aurait eu, en Côte d’Ivoire, un génocide pire qu’au Rwanda".
MM. Ouattara et Sarkozy s’entretiendront jeudi à l’Elysée avant d’avoir un dîner d’Etat. Ils signeront un nouvel accord de défense qui devrait prévoir le maintien de 250 à 300 soldats français sur la base de Port-Bouët, en banlieue d’Abidjan, la capitale économique et siège du pouvoir ivoirien, selon l’Elysée. Ces militaires seront chargés de missions de formation des nouvelles forces de sécurité (gendarmerie, police, armée) ivoiriennes.
La force Licorne compte aujourd’hui environ 450 hommes, contre 1.100 en octobre 2010 et un peu plus de 2.000 au pic de la crise post-électorale. "Nous souhaitons un accord de partenariat ambitieux et transparent. La France doit rester dans notre pays plus longtemps et de manière plus substantielle", explique Alassane Ouattara dans "Le Monde".
Le traité, qui sera intégralement publié et ne comportera donc aucune clause secrète, remplacera l’accord de 1961, comme c’est déjà le cas pour six autres pays d’Afrique (Togo, Cameroun, Gabon, Centrafrique, Comores, Djibouti), dans le cadre de la renégociation avec les anciennes colonies décidée en 2008 par le président Sarkozy.
La France doit encore signer un traité avec le Sénégal, probablement après l’élection présidentielle prévue en février dans ce pays, précise-t-on à l’Elysée.
Dans le cadre de l’aide au redémarrage économique, la France a, dès l’an dernier, accordé pour un total de 400 millions d’euros de prêts à la Cô te d’Ivoire. Elle doit également annuler 1 milliard d’euros de dette ivoirienne et, dans le cadre du programme international pour les pays pauvres très endettés (PPTE), conclure courant 2012 un contrat de désendettement et de développement (C2D) de 2 milliards d’euros pour des projets de lutte contre la pauvreté, de formation éducative et professionnelle des jeunes, et de renforcement de l’Etat de droit.
Vendredi, Alassane Ouattara, qui est accompagné par plusieurs de ses ministres et des chefs d’entreprise ivoiriens, sera reçu au siège du syndicat patronal français, le MEDEF. "Je lancerai un appel aux entreprises françaises pour les inciter à accélérer leur retour", en Cô te d’Ivoire, déclare-t-il au "Monde". Des négociations sont en cours, notamment avec le pétrolier Total et le groupe hô telier Accor.
Le président ivoirien sera ensuite accueilli par le maire de Paris, le socialiste Bertrand Delanoë, puis déjeunera avec le Premier ministre, François Fillon. Alassane Ouattara quittera la France samedi pour participer au sommet de l’Union africaine à Addis Abeba (Ethiopie) dimanche et lundi.