« Aujourd’hui, nous, personnes vivant avec le VIH, populations clés et vulnérables, représentants gouvernementaux, maires signataires de la charte +Ville sans sida+, activistes, travailleurs communautaires, médecins, personnalités publiques, du Maroc, de France et d’ailleurs, nous unissons à Essaouira pour exhorter tous les donateurs à augmenter leurs contributions au Fonds mondial afin de renforcer la riposte au VIH/sida, tout en pérennisant l’accès aux droits des communautés », lit-on dans cet « Appel », qui vient sanctionner les travaux de ce conclave.
« Sans la solidarité et la mobilisation internationale, la lutte contre le VIH/sida n’aurait pas connu de grandes avancées », soutiennent les conférenciers, notant que le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, créé en 2002, incarne cette mobilisation mondiale.
Et d’ajouter qu' »En 20 ans, il aura permis globalement de sauver 44 millions de vies et en particulier de réduire de 74% la mortalité du VIH et de 54% les nouvelles infections. C’est aussi l’outil qui a su soutenir la défense des populations marginalisées et les plus vulnérables à l’épidémie de VIH en appuyant l’approche communautaire, menée par les personnes concernées ».
« 2022, en plus de célébrer les 20 ans du Fonds, marque sa 7ème conférence de reconstitution dont la cible est fixée à un strict minimum de 18 milliards de dollars, un montant restreint face aux besoins réels constatés par les associations », souligne le document, expliquant qu’ »il s’agira d’un moment politique clé qui déterminera le visage de la lutte dans les années à venir. Un moment décisif appelant à voir des contributions ambitieuses et revues à la hausse pour compenser les reculs liés à la crise sanitaire ».
L’arrivée du Fonds mondial en 2004 au Maroc, rappelle-t-on, a marqué « un tournant dans la riposte au VIH. Il a appuyé les efforts gouvernementaux et a consacré le travail fondateur de la société civile mené conjointement avec les communautés pour une réponse faite avec elles et pour elles. C’est notamment le cas depuis l’instauration du dépistage communautaire au Maroc : alors que les associations impliquées dans le VIH Sida au Maroc ne réalisent que le dixième des tests, ces derniers représentent 50% des tests positifs, preuve du ciblage efficace de l’approche communautaire ».
« L’accès aux innovations en matière de dépistage et de traitement est essentiel pour une lutte efficace contre le VIH/Sida », préconisent les participants dans leur Appel.
« Cependant, n’oublions pas que les avancées ne sont jamais acquises », estiment-ils, affirmant que la crise sanitaire du Covid-19 n’aura pas épargné la santé mondiale.
Et d’expliquer qu’entre l’impact sur les systèmes de santé, les confinements à répétition et les conséquences économiques, les luttes contre les autres pandémies ont cruellement souffert ces deux dernières années.
Alors qu’un virus ne doit pas en cacher un autre, les chiffres avancés par le Fonds mondial sont sans appel : une baisse de 22% des dépistages au VIH et de 11% des services de prévention, indique le document, précisant que c’est la première fois en 20 ans que la lutte accuse de tels reculs. Un seul indicateur reste en hausse : la mise sous antirétroviraux a progressé de 9%, relève-t-on.
« C’est grâce à l’appui des agents de santé communautaire qui en ont permis la distribution », indiquent les participants, notant que « comme tant d’autres associations, l’Association de Lutte Contre le Sida (ALCS) a su rebondir et innover en apprenant de la lutte contre le VIH/sida pour limiter les conséquences du Covid-19 ».
« En assurant une dispensation plus large et démédicalisée des antirétroviraux et autres médicaments nécessaires par les acteurs communautaires, les associations ont pu désengorger les services de soins et autonomiser davantage les personnes vivant avec le VIH », soutiennent les conférenciers.
« Pour ne pas perdre du terrain dans la lutte contre le VIH/sida, nous avons besoin de moyens », recommandent-ils, ajoutant que les Nations Unies et ses membres se sont accordés sur la nécessité d’investir 29 milliards de dollars par an dans les pays à faible et moyen revenus d’ici 2025.
« Ce montant peut paraître vertigineux, mais chaque dollar versé aujourd’hui dans la lutte contre les trois pandémies représente 31 dollars de gains en dépenses de santé. Personne n’est en sécurité si tout le monde ne l’est pas », insistent-ils.
Cet Appel est « un cri de ralliement. En Afrique du Nord et au Moyen Orient, où la prévalence du VIH est en général faible, le nombre de personnes infectées croît un peu plus chaque année, particulièrement chez les plus vulnérables d’entre nous », soulignent-ils, précisant que « nous ne devons pas baisser la garde face au VIH/sida. La communauté internationale doit prendre ses responsabilités pour que l’épidémie ne reparte pas. C’est la seule solution pour cette septième reconstitution du Fonds Mondial ».
« Ayons toujours en tête la colère et les voix des personnes séropositives disparues, faute de traitements et de moyens donnés à la lutte. N’oublions pas celles et ceux qui ne sont plus là aujourd’hui faute de justice sanitaire », conclut l’Appel d’Essaouira.
La séance de clôture de cette rencontre a été marquée par un hommage rendu à l’ALCS au Maroc en reconnaissance de ses efforts et de son action en la matière. Un don a été ainsi remis aux représentants de l’Association par le Cercle Eugène Delacroix.
Il a été également procédé à la projection du film documentaire « Toujours en colère », qui présente des témoignages d’acteurs associatifs qui militent notamment en Afrique pour une meilleure riposte face au Sida.
Il a été aussi question de la restitution des travaux des trois tables rondes figurant à l’ordre du jour de cette rencontre, axées sur les actions de prévention et de lutte contre les discriminations à mettre en place pour favoriser et augmenter le taux de dépistage dans toutes les populations cibles, les dispositifs d’accompagnement des personnes vivant avec le VIH et de l’observance des traitements et sur l’évaluation des politiques de prévention et d’accompagnement thérapeutique sur un territoire.
Organisé à l’occasion des 40 ans de lutte contre le Sida par le Cercle Eugène Delacroix, en partenariat avec la ville d’Essaouira et Bayt Dakira, ce rassemblement a été l’occasion de mettre en lumière les actions de lutte au Maroc et en France pour mettre fin à la propagation du VIH.