Patrick Ollier, l’ami très personnel du régime libyen

L’actuel ministre, compagnon de Michèle Alliot-Marie, servait d’intermédiaire pour les ventes d’armes.

Patrick Ollier, l’ami très personnel du régime libyen
«Ce que je regrette, c’est la dérive du colonel Kadhafi», a déclaré, hier, sur Public Sénat, Patrick Ollier, le ministre chargé des Relations avec le Parlement, et jusqu’à présent meilleur soutien du régime libyen à Paris. «Regretter ce que j’ai fait, non. Je l’ai fait dans l’intérêt général», a-t-il dit. Depuis le début des troubles en Libye, Ollier n’avait pas osé prendre la parole. Déjà empêtré avec sa compagne, la ministre des Affaires étrangères, Michèle Alliot-Marie, dans l’affaire de leur voyage commun en Tunisie, il maintient qu’il avait politiquement raison de prendre position en faveur de Kadhafi et de son régime «en mutation».

Ses déclarations lors de l’accueil du dirigeant libyen à Paris, en décembre 2007, sont exhumées partout sur Internet. Président du groupe d’études parlementaire sur la Libye, qu’il a rebaptisé «groupe d’amitié», Ollier jure alors que Kadhafi a «totalement renoncé» à l’action violente et au terrorisme, et qu’il en a fourni «toutes les preuves».

«Voyages de travail». Cette impulsion est donnée par l’Elysée depuis la libération des infirmières bulgares en juillet 2007. Lors d’une audition devant l’Assemblée nationale en décembre 2007, Claude Guéant, le secrétaire général de l’Elysée, signale le «parcours de réhabilitation et de réinsertion» du colonel Kadhafi, et ses «réformes […] qui vont dans le sens d’un meilleur respect des droits élémentaires des individus».

Guéant, qui a avoué un contact personnel avec Moussa Koussa, l’ancien patron des services spéciaux libyens devenu ministre des Affaires étrangères, multiplie les «voyages de travail» à Tripoli – en juin et décembre 2009, puis en juillet 2010. Déjà intervenu sous Chirac pour faciliter la vente d’Airbus à la Libye, l’intermédiaire Alexandre Djouhri accompagne les efforts de Guéant en faveur des marchés français.

C’est la fin de l’embargo vers la Libye qui a réveillé en 2004 l’appétit des industriels, et l’intérêt d’Ollier pour ce pays. Il fonde un groupe parlementaire, qu’il anime seul. «Patrick Ollier conduisait ses opérations sans nous en parler, explique le vice-président de ce groupe, le député (UMP) Didier Julia. Il ne souhaitait pas associer les parlementaires. Et quand on lui en parlait, il était très évasif.» Ollier décide lui-même des nombreux voyages – une quinzaine – qu’il effectue. «A chaque fois qu’il y avait un accord en vue avec le ministère de la Défense, c’était Patrick Ollier qui s’en occupait», précise Julia. Alliot-Marie a en effet le portefeuille de la Défense. Le général Rondot, alors coordinateur du renseignement, notera sur ses carnets des soupçons de «compromission» et des références d’enquêtes visant Ollier. Comme l’a révélé le site Mediapart, un rapport de la Direction de la surveillance du territoire (DST) signale, en juillet 2005, une enquête effectuée sur Ollier par le cabinet d’investigations Kroll pour le groupe Thalès. En cause, un marché libyen.

Rafale. En 2006, année faste, Ollier annonce un prochain accord sur le nucléaire civil. Et Michèle Alliot-Marie affirme que la Libye est «intéressée par l’achat d’avions Rafale et d’hélicoptères Tigre». En décembre 2007, c’est Ollier qui se félicite sur Europe 1 des «discussions engagées pour différents armements». «Le colonel Kadhafi voudrait refaire sa flotte d’avions qui est tout à fait obsolète, dit-il. Je le souhaiterais pour Rafale. C’est un avion qu’on aimerait vendre.» L’industriel qui les produit, le sénateur (UMP) Serge Dassault, membre du groupe d’amitié France-Libye, ne pouvait mieux dire.

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