Madrid rend hommage à l’artiste-peintre Feu Mohammed Kacimi: Zoom sur l’homme qui jouissait d’une grande reconnaissance internationale
Le monde africain de l’artiste-peintre Feu Mohammed Kacimi, avec des dimensions variées alternant figuration et abstraction, signes et couleurs, mélancolie et engagement, a été savamment mis en scène dans l’exposition organisée du 28 janvier au 3 février 2021 par ‘’Galeria Edurne’’ de Madrid, pour rendre hommage à ce peintre nomade, injustement oublié par les galeries d’art marocaines.
Rompant avec cette idée fausse et toute faite selon laquelle les Africains n’ont jamais été en bons termes avec les arts plastiques, l’exposition donne à voir des dizaines de toiles de différentes formes d’expression réalisées par ce grand peintre qui, ancré dans la culture africaine, puise sa racine dans cette essence, pour jeter une vue des plus originales sur le continent noir. Ses œuvres (peintures, manuscrits, textes, photographies..), paraissent donner accès à l’autre côté du miroir, à cet ailleurs qui marquent l’entrée en africanité de ce natif de Meknès.
Esprit libre et nomade qu’il fut, il s’inspire d’abord de l’école française pour se convertir après à la couleur et à la nuance africaine débordant d’authenticité, essence de l’Univers.
Militant des droits de l’Homme, Kacimi transmet son dévouement pour l’homme et pour la vie avec passion et engagement. Son universalisme, et la modestie de son âme libre se reflètent dans ses toiles à la fois figuratives et abstraites sous forme de corps et d’objets habités, que l’écrivain artiste français, Alain Gorius, décrivait comme ‘’éléments fondateurs qui cristallisent le génie du créateur’’.
Mais l’art de Kacimi ne s’arrête pas là ; il illustre à la perfection son âme voyageuse dans d’autres formes de peinture telles celles gravées avec une nostalgie subtile et profonde dans des séries de toiles comme ‘’Africa’’ ( 1993) et ‘’Traversées’’ ( 1987). Mais aussi dans des dessins extraordinaires qui accompagnent ses fragments de poésie dans son fameux recueil ‘’l’ Été blanc’’. Ce sont tous des encres de Chine captivants où il ‘’ne trouvait nul moment de répit dans cette allée sombre’’, où ‘’Des merles traversent (son) léger sommeil .. le chant célèbre le dénouement des secrets’’ et où il ‘’la reçoit mauve semblable à la pleine lune ensorcelée vacillante entre l’étreinte et la séparation’’ : Des vers qui dessinaient avec une plume aussi fine, aussi colorée et aussi nuancée et métaphorique que son pinceau, l’intensité de sa vision et l’infinité de son art. Notre grand artiste, connu surtout par son art plastique, était aussi un grand poète au mot pénétrant, au rythme enchantant et à l’image belle et marquante.
Les œuvres de ce grand peintre occupaient souvent la Une des journaux français, notamment ‘’Le Monde’’ qui publiait régulièrement ses toiles à la première page, font ainsi une traversée mondiale dans des galeries, des conservatoires et des salons d’art de villes marocaines ( Meknès, sa ville natale, Rabat, Casablanca, Tanger…), françaises (Paris, Montpelier, Grenoble, Marseille …) espagnoles (Madrid, Séville…), africaines et arabes ( Dakar, Abidjan, le Caire..) et la liste est longue. Des lieux que son art rendait magique et où les amoureux de son empreinte se rendaient pour savourer une œuvre riche et féconde où se marient peintures ,dessins et poésies à la fois , tels ‘’la Confession d’Abraham’’, ‘’L’Orient après l’amour’’ et autres…
La simple évocation de ce grand artiste, nous renvoie d’emblée à ses pastels illustrant ces corps suspendus vers des horizons autres, portant sur un ailleurs où ses mondes différents, libérateurs et mystiques, surgissent grâce à l’élégance et à la maîtrise de sa main fine et combien talentueuse !
*Houda Alfachtali
Poétesse en anglais et français; Déléguée au Maroc du Forum Africain ‘’Afropoésie’’; Déléguée au Maghreb du Forum international de poésie ‘’Motivational Strips’’; Auteure de ‘’My Words and Worlds’’ ,’’Shades of My Soul’’ ; ‘’The Edge of the blue’’, ‘’Femmes Rêves’’ et ‘’Femmes Ecrites’’.