Les « Chibanis » marocains demandent en appel 628 millions d’euros à la SNCF pour discrimination
Les « Chibanis », cheminots d’origine marocaine qui estiment avoir été discriminés par la SNCF et dont le cas est examiné en appel depuis lundi, réclament 628 millions d’euros de dommages et intérêts, un montant jugé « exorbitant » mardi par la compagnie ferroviaire.
La SNCF réfute avoir traité différemment ses salariés marocains. Mais dans l’hypothèse où la Cour confirmerait la discrimination, la compagnie a contesté mardi le calcul du préjudice effectuée par l’avocate des Chibanis ("cheveux blancs" en arabe).
En 2015, les Chibanis demandaient 330 millions d’euros, aujourd’hui 628 millions d’euros pour différents préjudices (carrière, retraite, formation, d’accès aux soins, santé, etc…), soit "700.000 euros par demandeur", selon les calculs de la SNCF.
"Les montants sont exorbitants, sans aucune mesure avec la réalité", ont souligné les avocats du groupe, arguant que ces salariés "sans qualification" n’avaient "qu’une très faible chance, y compris s’ils avaient bénéficié des règles statutaires, d’arriver à une position cadre".
A l’inverse, l’avocate des Chibanis, Clélie de Lesquen-Jonas a dénoncé les méthodes "honteuses" de calculs de la SNCF qui aboutissent selon elle à des évaluations du préjudice allant de 6.000 à 50.000 euros par personne.
Joël Grangé, avocat de la SNCF, a fustigé "l’atmosphère punitive que veut donner à ce dossier le Défenseur des Droits" qui a incité mardi la cour à "taper fort au portefeuille" en estimant que les Chibanis avaient été victimes de "ségrégation" et de "racisme".
Des accusations "contraires aux valeurs de l’entreprise", "la SNCF est fière de ces Marocains qui ont servi pendant toutes ces années mais ce n’est pas parce qu’ils ont bien fait leur travail qu’ils devaient devenir tous cadres supérieurs", a plaidé l’avocat.
Tous ces salariés ont été recrutés entre 1970 et 1983 comme contractuels, et la plupart n’ont jamais accédé au "statut" de cheminot, plus avantageux, réservé aux ressortissants européens âgés de moins de 30 ans à l’embauche.
"Pour qu’il n’y ait pas de différence de traitement", la SNCF a assuré avoir pris des dispositions au fil des ans, comme élargir la grille d’évolution de carrière ou proposer un départ anticipé à la retraite, a détaillé M. Grangé.
Pour l’avocat général, ces "mesures de rattrapage" sonnent "un peu comme l’aveu d’un traitement plus avantageux pour les salariés français".
(Avec AFP)