La montée du racisme anti-arabe en Turquie menace le secteur touristique

Face à une montée inquiétante de la xénophobie en Turquie et la multiplication des actes d’agression contre les étrangers, notamment les touristes arabes, les autorités turques ont décidé de prendre des mesures contre ce fléau qui présente de graves conséquences sur le secteur touristique du pays.

Après la diffusion en septembre dernier sur les réseaux sociaux de la vidéo de l’agression d’un touriste arabe à Trabzon – une destination touristique célèbre sur la côte de la mer Noire qui attire des centaines de milliers de touristes arabes – Ankara a décidé de se concentrer sur la lutte contre le racisme et la xénophobie, qui prend de l’ampleur dans la société turque.

De nombreuses vidéos sur les réseaux sociaux de touristes arabes, agressés, maltraités et arnaqués, dénoncent le racisme des Turcs et déconseillent fortement aux arabes de se rendre en vacances en Turquie où la langue arabe a été interdite.

Les autorités craignent ainsi que les vidéos d’agressions contre des touristes arabes n’affectent l’image du pays comme destination touristique sûre, d’autant plus que la Turquie est l’une des principales destinations des ressortissants arabes, et ceux issus des pays du Golfe en particulier.

Depuis les dernières élections présidentielles et législatives, et les campagnes anti-étrangers lancées par les partis d’opposition et les organisations d’extrême droite, une flambée des actes de violence verbale et physique contre les étrangers a été observée. Ces violences se limitaient auparavant aux réfugiés, et aux Syriens en particulier, mais les agressions touchent aussi les touristes arabes, considérés pourtant comme l’une des catégories les plus dépensières pendant leur séjour en Turquie.

L’exécutif turc qui s’est engagé à renforcer ses efforts pour lutter contre la xénophobie en lançant de vastes campagnes de sécurité ciblant les instigateurs de tels actes et en accélérant l’expulsion   des migrants illégaux en général et des réfugiés syriens en particuluer.

Mesures judiciaires pour dissuader les incitateurs à la xénophobie

A la suite de l’attaque contre un touriste arabe à Trabzon, les autorités turques ont annoncé, le 20 septembre dernier, avoir arrêté 27 personnes dans différentes provinces du pays, accusées d' »incitation publique à la haine », d' »hostilité » et « diffusion d’informations trompeuses ». Parmi les détenus figurent des responsables de plusieurs pages informatives d’extrême droite et des comptes sur les réseaux sociaux qui encouragent les agressions contre les étrangers arabes.

Le parquet d’Ankara, qui a coordonné cette opération sécuritaire sans précédent, a expliqué que « les discours haineux diffusés sur Internet et les réseaux sociaux ont été partagés pour inciter les gens à la haine et à l’hostilité en diffusant des informations trompeuses ».

Il a précisé que 23 des suspects ont été traduits en justice qui a décidé le placement en détention de 8 d’entre eux et la mise en liberté de 15 autres, qui ont été interdits de voyage et placés sous contrôle judiciaire.

Le président turc, Recep Tayyip Erdoğan, a pour sa part, affirmé que « les auteurs de ces agressions odieuses contre les touristes seront punis devant la justice », tout en condamnant tout discours raciste incitant à la haine.

Erdogan a également déclaré à la presse, en marge de sa participation à la 78e session de l’Assemblée générale des Nations Unies à New York, que les autorités sécuritaires « font preuve de la plus grande vigilance face à de telles provocations et renforcent leurs mesures jour après jour » pour lutter contre ce fléau, soulignant que son pays « ne tolérera pas la propagation de la haine envers les étrangers au sein de sa société ».

Lutter contre l’immigration illégale, une clé pour éliminer la xénophobie ?

Depuis le déclenchement de la guerre civile syrienne en 2011, la Turquie a ouvert ses frontières aux migrants et aux réfugiés, accueillant plus de 3,5 millions de Syriens et de milliers d’autres de différentes nationalités, ce qui a créé un certain nombre de défis sociétaux exacerbés par la crise économique qu’a connu le pays ces dernières années .

Les partis d’opposition et les organisations d’extrême droite, notamment le « Parti de la Victoire » et son leader controversé, Ümit Özdağ, ont surfé sur la vague pour attiser la haine envers les étrangers, en accusant les réfugiés et les migrants d’être à l’origine de la crise économique et d’avoir contribué à des niveaux records d’inflation.

Lors des dernières élections, la rhétorique politique anti-étrangers a atteint son paroxysme, avec de nombreux candidats à la présidence promettant « l’expulsion forcée » de tous les réfugiés et migrants.

Dans le but de ne pas laisser la place à l’opposition, le gouvernement turc s’emploie à renvoyer dans leurs pays les réfugiés et les migrants qui n’ont pas de statut légal ou ont enfreint les conditions de leur séjour dans le pays.

Le ministre de l’Intérieur, Ali Yerlikaya, a récemment annoncé l’expulsion de près de 43.000 immigrants irréguliers entre le 1er juin et le 22 septembre de cette année.

Le responsable a également annoncé la généralisation du système des bureaux de l’immigration mobiles – testé à Istanbul l’été dernier -, dans tout le pays dans le but de vérifier l’identité et la situation légale des étrangers. Ces efforts visent à limiter la présence des migrants irréguliers dans le pays, en particulier dans les grandes villes, dans l’espoir de limiter la montée de la xénophobie.

 

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