En Libye, la Banque centrale et la compagnie pétrolière rallient le gouvernement d’union
Le gouvernement d’union nationale en Libye a conforté son pouvoir dimanche en obtenant le soutien de deux institutions clé, la Banque centrale maître des finances et la Compagnie nationale de pétrole (NOC) qui gère la principale ressource du pays.
Ces deux autorités concurrentes qui gouvernaient la Libye jusqu’ici refusent de céder le pouvoir au gouvernement d’union qui a lui obtenu vendredi l’appui du Conseil de sécurité de l’ONU et dont le Premier ministre Fayez al-Sarraj s’est installé à Tripoli mercredi.
Dans un communiqué publié dimanche, la Banque centrale de Libye (BCL) "salue" l’arrivée du gouvernement d’union "et les résolutions du Conseil de sécurité" de l’ONU.
"Il est de notre devoir à nous tous d’oeuvrer sans relâche pour l’unité de notre pays et de redonner espoir à la Libye (…), en aidant l’économie par la relance de la production et des exportations pétrolières (…)", a ajouté la BCL.
Avant la Banque centrale, la compagnie nationale pétrolière avait aussi apporté son soutien au gouvernement d’union.
"Nous travaillons avec le Premier ministre (Fayez) al-Sarraj et le conseil présidentiel pour dépasser nos divisions", a indiqué Mustafa Sanalla, son PDG dans un communiqué.
"Nous avons maintenant un cadre légal international pour travailler", a-t-il ajouté en référence au soutien de la communauté internationale au gouvernement Sarraj.
L’entreprise publique, basée à Tripoli et qui gère le secteur pétrolier et gazier en Libye, a toujours bénéficié de la reconnaissance de la communauté internationale même si elle dépendait des autorités non reconnues contrôlant la capitale depuis l’été 2014.
La Libye dispose des réserves pétrolières les plus importantes d’Afrique, estimées à 48 milliards de barils. Sa production était estimée à 1,6 million b/j en 2011 mais a chuté d’un tiers depuis en raison de l’anarchie dans le pays.
– Les clés des finances –
Par leur soutien, ces deux institutions économiques ont déposé les clés des finances libyennes entre les mains du chef du gouvernement d’union Fayez al-Sarraj, estiment les experts.
Ce gouvernement va ainsi pouvoir contrôler les avoirs et les revenus libyens à l’intérieur comme à l’étranger.
"La banque centrale et la NOC ont toujours veillé à rester à l’écart de la politique mais ce soutien fracassant équivaut à un vote de confiance qui vient renforcer sa position (du gouvernement d’union)", a indiqué à l’AFP une analyste libyenne du secteur bancaire qui a préféré garder l’anonymat pour des raisons de sécurité.
"Ces deux institutions sont à la base de la survie des Libyens. Sans elles, le gouvernement d’union nationale ne peut pas fonctionner", a-t-elle ajouté.
En moins d’une semaine, Fayez al-Sarraj et son gouvernement ont obtenu plusieurs soutiens politiques et économiques.
Les municipalités de dix villes situées entre Tripoli et la frontière tunisienne dont Sabratha, Zawia et Zouara, ont ainsi appelé jeudi à le "soutenir".
M. Sarraj a aussi reçu le soutien des gardes des principales installations pétrolières du pays.
Le gouvernement d’union a été mis en place après un accord signé fin 2015 sous l’égide de l’ONU par des députés des deux Parlements rivaux et ce malgré l’opposition des chefs de ces institutions.
Pour être officiellement investi, il devait obtenir la confiance du Parlement de l’Est, basé à Tobrouk. Mais ce vote n’a jamais eu lieu faute de quorum.
Le gouvernement d’union s’est alors autoproclamé en fonction le 12 mars sur la base d’un communiqué de soutien publié par une centaine de parlementaires de Tobrouk (sur 198).
Dimanche, l’émissaire des Nations unies pour la Libye Martin Kobler a reconnu que le Parlement de Tobrouk, reconnu par la communauté internationale, "reste l’instance légitime qui doit adouber le gouvernement d’union".
"Je presse le Parlement de tenir une session pour voter (la confiance) en toute liberté", a-t-il ajouté.
Depuis des mois, la communauté internationale appelle de ses voeux un gouvernement d’union avec laquelle elle espère travailler pour stopper la montée en puissance du groupe jihadiste Etat islamique (EI) qui a profité du chaos dans le pays pour se renforcer, notamment dans la ville côtière de Syrte.