Afrique: deux députés français regrettent la dimension répressive de la politique de délivrance des visas

En Afrique, obtenir un visa pour la France relève souvent d’un parcours de combattant. Le continent compte le plus de pays soumis à visas et les taux de refus de visa sont les plus élevés. Tel le constat auquel sont parvenus deux députés de la majorité, Sira Sylla, élue de Seine-Maritime et spécialiste des diasporas africaines, et M’jid El Guerrab, député des Français de l’étranger (Afrique du Nord et Afrique de l’Ouest).

Dans un rapport présenté mardi 12 janvier devant l’Assemblée nationale, les deux députés regrettent que le sécuritaire et les considérations migratoires pèsent de manière excessive sur la politique des visas et constatent que la question des visas est un « sujet véritablement politique » entre la France et les pays africains.

Le 28 novembre 2017, le président de la République promettait à la jeunesse africaine « la révolution de mobilité, […] celle qui nous permettra de repenser nos liens, mais aussi la circulation des femmes et des hommes en Afrique, et entre l’Afrique et l’Europe ».

« Trois ans après le discours de Ouagadougou, vos rapporteurs regrettent que la politique des visas à l’égard des populations africaines reste très en deçà de l’ambition présidentielle. Cette mission est avant tout destinée à résorber le décalage entre le discours et la réalité », font valoir les deux députés.

« De par l’histoire et les relations humaines qui unissent l’Afrique à la France, l’Afrique est le continent vis-à-vis duquel les déterminants de la politique des visas – entre risque migratoire et attractivité – sont les plus difficiles à concilier », soulignent Sira Sylla et M’jid El Guerrab.

Délais trop longs d’octroi de visas, difficulté liée à la prise d’un rendez-vous, refus injustifiés, visa trop cher…Autant de questions auxquelles les deux rapporteurs ont essayé de trouver des réponses, voire des solutions.

En 2019, 680 000 décisions de refus de visa ont été prises par les autorités
consulaires. Sur ce total, 37 000 recours administratifs ont été déposés devant la commission de recours contre les refus de visa. 3 000 recours contentieux ont été portés devant la juridiction administrative elle-même. Dans un tiers des cas, soit environ 1 000 cas, le juge a prononcé une injonction à délivrer le visa.

Pour pallier à cette dimension répressive de la politique de délivrance des visas, les deux députés font plusieurs propositions, dont l’élargissement du dispositif de délivrance des visas en 48 heures et le rééquilibrage des rôles du ministère de l’Intérieur et du Quai d’Orsay, au profit de ce dernier, dans le pilotage de la politique des visas.

Les propositions du rapport d’information sur la politique de délivrance des visas :

Proposition n°1 : Inscrire, de façon immédiate, les bénéficiaires du regroupement dans la catégorie des personnes bénéficiant d’une dérogation à la fermeture des frontières dans le contexte de la pandémie mondiale.

Proposition n°2 : Rééquilibrer les rôles du ministère de l’Intérieur et du Quai d’Orsay, au profit de ce dernier, dans le pilotage de la politique des visas.

Proposition n°3 : Conduire une vaste étude sur le devenir des étudiants étrangers à deux ou cinq ans après leur diplôme.

Proposition n°4 : Expertiser l’idée de créer un système de garant des demandeurs de visa lorsque ces derniers ne peuvent justifier de ressources suffisantes.

Proposition n°5 : Renforcer la mission de l’OFII d’aide au retour et à la réinsertion des personnes ayant immigré en France.

Proposition n°6 : Inscrire les visas dans un dialogue bilatéral plus large que la réadmission avec les pays d’origine à risque migratoire.

Proposition n°7 : Donner aux opérateurs publics directement concernés par la politique des visas (Campus France, Business France, Atout France) un accès direct aux chiffres de suivi de la délivrance des visas.

Proposition n°8 : Accroitre la part des visas délivrés sous la forme de visas de circulation afin de rapprocher la France de la moyenne européenne.

Proposition n°9 : Augmenter la part des passeports-talents délivrés aux ressortissants des pays d’Afrique subsaharienne.

Proposition n°10 : Faire évoluer la communication des consulats dans un sens plus positif afin de valoriser les opportunités d’accueil offertes par la France.

Proposition n°11 : Élargir autant que possible le prépaiement des frais de service du prestataire lors de la prise de rendez-vous pour une demande de visa.

Proposition n°12 : Établir, au niveau du code communautaire des visas, une distinction entre les premières demandes et les demandes de renouvellement de visas du point de vue de la liste des justificatifs à fournir.

Proposition n°13 : Élargir le dispositif de délivrance des visas en 48 heures à de nouveaux pays, en particulier en Afrique, et à de nouveaux publics. — 38 —

Proposition n°14 : Assurer prioritairement la mise en œuvre complète du projet « France-Visas » d’ici la fin 2021 en s’appuyant sur la hausse des crédits de la direction du numérique voté par le Parlement dans le cadre du budget pour 2021.

Proposition n°15 : Élaborer de nouveaux indicateurs sur lesquels appuyer la répartition des personnels consacrés aux visas au sein du réseau consulaire

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