L’Arabie saoudite ouvre sa Bourse aux investisseurs étrangers
L’Arabie saoudite a ouvert lundi sa Bourse aux investisseurs étrangers, témoignant des ambitions du royaume de devenir une place forte mondiale de la finance en plus du pétrole.
Annoncée de longue date, elle s’est déroulée sans déclencher de fluctuations majeures: l’indice Tadawul All-Shares (TASI) a d’abord progressé de près de 0,5 point avant de reculer de 0,44 à la mi-séance.
Jusqu’ici, seules les sociétés enregistrées en Arabie saoudite ou dans un des cinq autres pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG) étaient autorisées à acheter ou vendre sur le marché saoudien. Les étrangers devaient, eux, passer par des fonds d’investissements saoudiens ou basés dans les autres pays du CCG.
Désormais, "les investisseurs étrangers habilités", qu’ils soient des banques, des maisons de courtage, des fonds d’investissement ou des compagnies d’assurance, "peuvent commencer à opérer sur des actions cotées", a annoncé la Bourse.
Ils devront pour cela remplir des conditions et "il y aura des restrictions sévères (…) sur la prise de participation étrangère", précise l’institut de recherche Capital Economics.
Malgré cela, ces mesures, qui ne concernent pas les particuliers, "peuvent être perçues comme le premier pas vers une plus grande libéralisation" de l’économie, dans un pays traditionnellement sensible à toute influence politique et économique étrangère, estime l’institut.
Actuellement, 162 compagnies sont cotées sur la Bourse saoudienne, dont Saudi Telecom Co et le géant de la pétrochimie Sabic. Sa capitalisation boursière totale s’élève à 560 milliards de dollars, soit plus que toutes les autres places du Golfe, comme Dubaï, réunies.
Les analyses estiment que les investissements étrangers pourraient atteindre à terme 40 à 50 milliards de dollars.
– Ambitions internationales –
L’ouverture du TASI coïncide avec une période délicate pour les finances du royaume, affectées par la chute des cours du pétrole ces derniers mois.
De ce fait, l’Arabie saoudite devrait afficher un déficit budgétaire de l’ordre de 20% de son PIB en 2015, soit quelque 130 milliards de dollars, en raison du maintien de dépenses élevées, a récemment averti le Fonds monétaire international (FMI).
Les prix du pétrole ont chuté de 115 dollars le baril en juin 2014 à 46 dollars en janvier avant de remonter autour de 65 dollars.
Les revenus pétroliers représentent plus de 90% des revenus publics de l’Arabie saoudite, le premier exportateur de brut au monde qui pompe 10,3 millions de barils par jour.
Les institutions internationales estiment que, pour financer le déficit public, le gouvernement va devoir emprunter sur les marchés financiers pour la première fois en 15 ans, en dépit de ses énormes réserves en devises étrangères.
Ces dernières ont chuté de 49 milliards de dollars durant les quatre premiers mois de l’année, à 683 milliards à la fin avril, selon le cabinet saoudien de consultants Jadwa Research.
Dans un tel contexte, "un influx d’investissements étrangers aiderait à réduire le rythme de réduction des réserves", avance Capital Economics.
Mais les experts ne s’attendent pas à une ruée d’institutions financières étrangères, en raison des conditions posées, que ce soit sur leur présence dans le pays ou leur taille. Elles devront gérer au moins 18,75 milliards de riyals (4,5 milliards d’euros). Chaque "investisseur qualifié" ne pourra contrôler plus de 5% du capital d’une société cotée.
Plus qu’un intérêt financier, Mazen al-Sudairi, de la société Alistithmar Capital, voit l’ouverture aux sociétés étrangères comme un moyen important d’améliorer et de moderniser le fonctionnement de la Bourse de Ryad, que ce soit en terme de transparence, de méthodes comptables ou de volatilité du marché.
Car l’ambition de l’Autorité boursière (CMA) saoudienne est que Ryad prenne une "place de leader" sur le marché international, selon son porte-parole Abdullah al-Kahtani.
Notamment en entrant dans l’indice MSCI des marchés émergents à l’horizon 2017. Bien que membre du G20, l’Arabie saoudite est actuellement la seule économie émergente à ne pas être présente dans cet indice, fait remarquer la National Bank of Kuwait (NBK).