«Dans des circonstances exceptionnelles, nous croyons tous les deux qu’il doit y avoir des modifications au traité de Schengen sur lesquelles nous avons décidé de travailler ensemble», a développé Berlusconi, annonçant l’envoi d’une lettre conjointe au président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, pour demander «une plus grande collaboration» des autres pays européens avec les pays de la rive sud de l’UE. Ces pays «ne peuvent être laissés seuls», a-t-il soutenu.
Ils lui demandent d’«examiner la possibilité de rétablir temporairement le contrôle aux frontières intérieures» des Etats membres. Une mesure qui, précise la lettre, doit être envisagée «en cas de difficultés exceptionnelles dans la gestion des frontières extérieures communes, dans des conditions à définir».
Après avoir constaté que «les pressions aux frontières communes entraînent des conséquences pour l’ensemble des Etats membres», Sarkozy et Berlusconi suggèrent que «le conseil européen de juin [ donne] l’impulsion politique». «La principale priorité pour l’Union européenne est de trouver très rapidement un accord global avec ses voisins du Sud de la Méditerranée», poursuit le texte.
Les deux dirigeants demandent également que les «mécanismes de solidarité financière» à l’égard des Etats accueillant les immigrés soient «renforcés», tout en jugeant «fondamental» que «l’UE réalise un régime d’asile européen commun». Ils citent, comme piste, un renforcement de l’agence européenne chargée des questions d’immigration, Frontex.
«Nous n’allons pas révolutionner quoi que ce soit»
Un porte-parole de la Commission européenne a annoncé que celle-ci allait redéfinir les «conditions exceptionnelles» permettant aux Etats membres de Schengen de rétablir «temporairement» des contrôles à leurs frontières nationales. «Il est déjà possible de rétablir temporairement des contrôles aux frontières nationales. Ce que nous cherchons, c’est de préciser les conditions dans lesquelles cela sera possible», a expliqué Olivier Bailly. Des propositions seront formulées le 4 mai par la commissaire chargée de la Sécurité, Cecilia Malmström, en vue d’un premier examen par les ministres de l’Intérieur de l’UE le 12 mai. «Mais nous n’allons pas révolutionner quoi que ce soit, a averti le porte-parole. Il s’agit d’aider à régler les différences d’interprétation» sur ces règles.
La rencontre franco-italienne devait servir à apaiser les tensions entre les deux pays, sur le dossier des immigrés tunisiens, la Libye et les acquisitions d’entreprises françaises dans la péninsule.
L’immigration et le réexamen du traité de libre circulation de Schengen étaient les points les plus sensibles du sommet. Ce week-end, Henri Guaino avait tenté de rectfiier le tir après le tollé suscité par l’annonce, vendredi soir par l’Elysée, d’une possible «suspension» des accords de Schengen. La France «ne veut pas suspendre Schengen» mais «revoir les clauses de sauvegarde dans des situations particulières», a nuancé le conseiller spécial de Nicolas Sarkozy. L’Italie s’était, elle, déjà dite favorable à une sorte de «contrôle technique» pour déterminer à quel point le traité est adapté aux réalités actuelles, avait expliqué le chef de la diplomatie italienne Franco Frattini.
Le 17 avril, Paris a suscité la colère de Rome en suspendant la circulation des trains depuis la ville italienne de Vintimille vers la France, estimant qu’un train avec à bord des manifestants voulant accompagner des immigrés tunisiens posait un risque pour l’ordre public. La France est, de son côté, irritée par l’Italie qui a décidé d’octroyer des permis de séjour de six mois aux plus de 20.000 Tunisiens arrivés sur ses côtes depuis janvier pour qu’ils puissent rejoindre «amis et parents» en France et ailleurs en Europe.