“En dépit de nombreux appels des experts indépendants onusiens à réviser sa législation antiterroriste qui viole tant le droit interne que le droit international, les autorités algériennes ont procédé à l’inscription illégale de 16 personnes dans des listes « terroristes »”, relève l’ONG de défense des droits de l’homme, créée en 2004 pour soutenir tous les individus, dans le monde arabe, soumis, ou à risque d’exécution extra-judiciaire, de disparition forcée, de torture ou de détention arbitraire.
En l’absence de recours effectifs contre ces inscriptions, plusieurs des personnes concernées ont décidé de référer leur situation à plusieurs titulaires de mandats au titre des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies pour dénoncer la violation de leurs droits et libertés fondamentales, note la même source, qui a soulevé cette question devant l’ONU.
Ces listes avaient déjà été qualifiées en septembre 2021 d’illégales par les experts indépendants des droits de l’homme des Nations Unies, tant du point de vue du droit international que de celui du droit algérien, rappelle Karama, ajoutant que ce n’est d’ailleurs pas la première fois que des organes onusiens rappellent les autorités d’Alger à leurs obligations internationales en matière de respect des droits fondamentaux des citoyens algériens.
En 2018, le Comité des droits de l’homme avait déjà exprimé ses préoccupations « quant à l’article 87 bis du Code pénal retenant une définition du crime de terrorisme trop large et peu précise, permettant la poursuite de comportements qui relèvent de la pratique de l’exercice de la liberté d’expression ou de rassemblement pacifique”, soutient l’organisation.
Et de poursuivre que ce n’est pas la première fois que les autorités algériennes font recours aux listes « terroristes » contre des opposants politiques, précisant que par lettre datée du 16 avril 2003, le gouvernement algérien, par la voix de son représentant permanent aux Nations-Unies à New-York, avait demandé au Conseil de sécurité de l’ONU d’inscrire plusieurs militants politiques algériens sur les listes d’Al Qaida.
Le Conseil de Sécurité avait alors rejeté ces prétentions au motif que les informations données par les autorités algériennes étaient « peu fiables », observe-t-on.
Dans sa plainte, Alkarama a rappelé que les dispositions anti-terroristes contenues dans le Code pénal algérien sont en violation flagrante des obligations internationales de l’Algérie, rendant ainsi toute inscription d’entités ou de personnes nulles en droit international.
Or, pour réprimer la société civile, les autorités algériennes ont édicté une définition particulièrement extensive du terrorisme, en associant les actes dits « subversifs » et actes « terroristes » en omettant de préciser que ces actes doivent être violents et avoir pour but de semer la terreur parmi les civils. Ainsi, la définition adoptée permet aux autorités de poursuivre, en vertu de la législation anti-terroriste, des personnes pour des actes non violents comme l’entrave à la circulation dans le cadre de manifestations ou encore l’occupation des places publiques, renchérit l’organisation.
Notant que c’est sur le fondement de ces textes que depuis 2019, un nombre croissant de militants, journalistes et défenseurs des droits humains actifs dans le Hirak, ont été poursuivis en justice sous des accusations de terrorisme, Alkarama dénonce que ces listes servaient au régime d’Alger de peines de substitution produites exclusivement par un organe sécuritaire en dehors de toute procédure judiciaire, notamment contre les opposants qui se trouvent à l’étranger.
L’organisation rappelle également les décisions récentes d’INTERPOL de refuser de donner suite aux demandes des autorités d’Alger d’émettre des notices rouges contre les personnes listées et au refus des autorités judiciaires de plusieurs États de les extrader du fait du caractère totalement infondé des demandes.