Une réaction attendue après la publication dans Libération de documents administratifs encourageant à donner la priorité aux personnes en situation régulière. Le quotidien s’est notamment procuré un mail de la Direction départementale de la cohésion sociale (DDCS) du Calvados adressé aux associations d’accueil de SDF, demandant ne plus prendre en charge les déboutés du droit d’asile, pour faire face au manque de places. Autre exemple cité par le journal, dans le Haut-Rhin: le cahier des charges du 115 prévoit la prise en compte du "statut administratif" des sans-abri.
Sur le site Internet de la revue Actualité sociales hebdomadaires -destinée aux travailleurs sociaux-, plusieurs responsables associatifs, dont un directeur du réseau ville-hôpital, font aussi état de consignes données au 115, le Samu social, pour sélectionner les gens en cas de manque de place, particulièrement criant à en Ile-de-France. Dans ce contexte, et alors que le froid sévit déjà, la Croix Rouge s’inquiète également du sort des migrants et des demandeurs d’asile, qui n’osent pas toujours se présenter dans ces centres de peur d’être expulsés.
Selon le ministre, qui s’est dit "choqué" par ces dérives, il s’agirait de pratiques isolées. A la Mie de pain, plus grand centre d’hébergement d’urgence parisien (432 lits), on nie d’ailleurs tout écrémage.
Il n’empêche, même si la discrimination n’est pas la règle, son existence inquiète. "Les étrangers sans-abri ne sont pas des variables d’ajustement", s’indigne dans un communiqué la Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale (Fnars), qui regroupe 850 associations s’occupant de près de 3.000 services d’aide aux sans-abri. Elle rappelle que "le principe d’accueil inconditionnel des plus démunis" est inscrit dans l’article L 11-2 du Code d’action sociale qui "impose d’accueillir toutes les personnes sans abri ou en détresse, sans poser de condition de régularité de séjour". Tous les centres d’hébergement sont donc dans la légalité "lorsqu’ils accueillent des étrangers en situation de détresse, quelle que soit leur situation administrative", souligne encore la Fnars.
Le principe d’inconditionnalité a été rappelé en 2007 par Nicolas Sarkozy: "Ce n’est pas aux associations de contrôler les papiers", avait-il assuré alors que certains députés UMP s’étaient prononcés pour l’abrogation du principe d’inconditionnalité.