Des Libyennes candidates face à une société conservatrice

Un large sourire sur le visage, Majdah al Fallah serre les mains d’électeurs potentiels dans le centre de Tripoli, où elle fait campagne en vue des élections législatives de samedi. (voir )

Revenue d’Irlande où elle a exercé la médecine pendant plusieurs années, la candidate du Parti de la justice et de la construction (PJC), la branche politique libyenne des Frères musulmans, et sa petite équipe font face à certaines réactions hostiles.

"Parfois, quand je distribue le tract, certaines personnes le refusent, ou le prennent et le déchirent car il y a des femmes dessus", raconte Huthaifa al Harral, un jeune homme de 20 ans qui fait campagne pour Majdah al Fallah et une autre femme sur la même liste.

Même si la loi électorale votée en janvier impose aux partis de présenter le même nombre d’hommes et de femmes, le conservatisme social et religieux de la société civile, y compris chez les Libyennes, s’accommode mal de la présence de candidates.

"Les femmes avec lesquelles je travaille me disent qu’elles ne voteront pas pour une femme et qu’il vaut mieux un homme", rapporte Fatima Gleidan, une professeur de 47 ans venue assister à la campagne de Majdah al Fallah.

A Tripoli et Benghazi, la deuxième ville du pays et le coeur de l’insurrection contre l’ancien dirigeant Mouammar Kadhafi, des dizaines d’affiches électorales des femmes ont été déchirées ou gribouillées.

EXEMPLES DECOURAGEANTS

Selon Majdah al Fallah, cette hostilité ne fait qu’accentuer la responsabilité des candidates, dont certaines veulent prouver qu’elles n’ont pas seulement été placées sur les listes pour respecter la loi électorale.

"Certaines (…) se présentent pour montrer (…) que nous sommes nous aussi capables de faire de la politique", déclare-t-elle.

L’exemple des autres pays secoués par le "Printemps arabe" ne montre cependant pas une amélioration de la représentation politique des femmes.

Selon une étude de l’Union interparlementaire (UIP), qui rassemble les représentants des parlements de 157 pays, la proportion de femmes au parlement égyptien est tombée de 12% sous l’ère Moubarak, à 2% après les élections de l’hiver dernier.

En Tunisie, la loi électorale a permis aux femmes d’occuper 30% des sièges de l’assemblée constituantes, mais les principaux ministères sont occupés par des hommes.

Au total, selon l’UIP, seulement 10,7% des parlementaires dans l’ensemble du monde arabe sont des femmes, ce qui fait de la région la seule au monde où la représentation politique des femmes est inférieure à 30%.

Pour certaines candidates libyennes, la tenue d’ élections, interdites par Mouammar Kadhafi qui les jugeaient "bourgeoises", permet aux femmes de partir sur la même ligne de départ que les hommes et de ne pas pâtir d’un manque d’expérience.

"La politique est un nouveau terrain pour les hommes et les femmes", souligne Lamia Busidra, âgée de 38 ans, une candidate du parti islamiste al Wattan, l’un des favoris des élections.

D’autres veulent profiter de cette élection pour évoquer des thèmes liés à la condition de la femme, comme l’explique Amani Benzeitoune, qui fait ses courses à Girharech, un faubourg de Tripoli.

"Nous devons vraiment faire valoir nos droits notamment pour le divorce, la garde des enfants et l’héritage", plaide-t-elle.

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