Le financement du budget de 2024 se présente comme une équation à plusieurs inconnus, avec pour ingrédients, le manque de visibilité, le retard des réformes, l’absence d’accord avec le Fonds monétaire international (FMI) et la dégradation des relations de la Tunisie avec l’Union Européenne.
Dans ce contexte, on ne sait pas quelles seraient les acrobaties auxquelles le pouvoir en place optera pour éviter au pays les écueils des tensions, des pénuries cycliques, améliorer les services publics (santé, transport) et restaurer la confiance.
Le gouvernement serait-il contraint à continuer à siphonner les ressources des banques pour financer le budget et à sacrifier l’investissement privé notamment, condition sine qua none pour impulser l’investissement actuellement en berne et améliorer l’épargne nationale dont le taux a baissé drastiquement ?
Avec la diabolisation des hommes d’affaires et son lot de poursuites judiciaires engagées contre les responsables de certains grands groupes économiques, il sera difficile de créer les conditions idoines pour relancer l’investissement, seul à même de desserrer les pressions exercées sur le marché de l’emploi, d’une part, et de favoriser une croissance à la fois accélérée et inclusive. A cet effet, quelles réponses proposera le gouvernement à l’érosion du pouvoir d’achat, à la maîtrise d’une poussée inflationniste, et à l’assurance d’un approvisionnement normal du pays en produits de base essentiels ?
A l’heure actuelle, les réponses tardent à voir le jour et les pouvoirs publics privilégient plutôt un discours souvent inquisiteur et aux relents populistes. D’ailleurs les experts les plus avertis prévoient une accentuation des difficultés de mobilisation des ressources de financement qui risquent de poser de sérieux problèmes au niveau de l’équilibre de la balance des paiements et du budget de l’Etat et au niveau du remboursement de la dette extérieure.
Ce qui corrobore ce sentiment, c’est à l’évidence les prévisions établies par les différentes institutions financières internationales. Le 10 octobre dernier, le FMI a revu à la baisse ses prévisions de croissance économique pour la Tunisie, s’attendant à une croissance atone de 1,3% pour 2023, et à peine mieux en 2024, à 1,9%.
Pour sa part, la Banque mondiale (BM) prévoit un ralentissement économique de la Tunisie, tablant sur une croissance de seulement 1,2 %.
En dépit de quelques signes encourageants enregistrés qui se perçoivent à la légère amélioration du déficit budgétaire, devant passer de 6,6 % du PIB en 2022 à 5,6 % en 2023, les besoins bruts de financement devraient augmenter, en revanche, à 16% du PIB en 2023, comparativement à 12,6% en 2022, en raison d’échéances importantes liées à la dette extérieure.
L’autre source de préoccupation concerne la gestion de la dette extérieure qui a atteint ces dernières années des niveaux sans précédent. La dette extérieure a atteint au terme des sept premiers mois de cette année 1,7 milliard de dollars. Cela fait que le service de la dette extérieure a absorbé 65% des recettes du tourisme ainsi que des transferts de la diaspora à fin juillet dernier.
Pour l’année 2023, l’État devra rembourser en principal de la dette publique un montant record de 15.793 millions de dinars (1 euro= 3,3 dinars), dont 9.121 millions de dinars en principal de la dette intérieure et 6.672 millions de dinars en principal de la dette extérieure.
En attendant la divulgation des dispositions du projet de la loi de finances pour 2024, le gouvernement a cherché à rassurer la communauté des affaires et aussi les contribuables assurant que le projet de Loi de Finances pour l’année 2024 ne comportera pas de nouvelles mesures fiscales pour les citoyens et les entreprises.
Au regard des fortes pressions exercées sur les finances publiques et le tarissement des ressources extérieures, le gouvernement pourrait-il tenir sa promesse?