Les trois États membres de l’Union européenne, qui ont arraché au Sommet européen de mai dernier une exemption de 18 mois avant d’appliquer les sanctions imposées par Bruxelles sur les produits pétroliers russes, ont finalement convaincu l’Ukraine d’ouvrir les vannes de l’oléoduc, suite au paiement des frais de transit, à travers le territoire ukrainien, a rapporté l’agence de presse tchèque (CTK).
Le raffineur slovaque Slovnaft et son propriétaire hongrois MOL (compagnie pétrolière et gazière hongroise) ont payé les frais de transit pour le transport de pétrole brut via la branche sud de l’oléoduc Droujba (amitié), suite à un accord entre l’Ukraine et la Russie.
L’Ukraine avait suspendu l’exportation de pétrole via la branche sud de l’oléoduc depuis le 4 août, parce qu’elle n’avait pas reçu de la Russie l’argent nécessaire au transit pour le mois d’août. La Russie avait bien envoyé l’argent, mais il lui avait été retourné en juillet, conséquence des sanctions anti-russes imposées par l’UE, suite au conflit russo-ukrainien, souligne-t-on de même source.
L’oléoduc Droujba commence en Russie sur la rive orientale de la Volga (centre de la Russie) et se divise en deux branches en Biélorussie : Celle du nord mène à la Pologne et à l’Allemagne, et l’autre du sud traverse l’Ukraine pour acheminer le brut vers la Hongrie, la Slovaquie et la Tchéquie.
Selon Ivan Indracek, président de l’Union tchèque des producteurs de pétrole, cité par la chaine de télévision pragoise Nova, ‘’si l’approvisionnement en pétrole par l’oléoduc Droujba est arrêté, la République tchèque et la Slovaquie seront les pays les plus durement frappés par l’embargo sur le pétrole russe’’.
A Bratislava, Slovnaft a mis en garde contre la pénurie de carburant en Europe centrale en cas d’interruption de l’importation du pétrole russe avant l’échéance fixée par Bruxelles aux trois États.
En mai dernier, l’UE avait décrété une sixième série de sanctions contre la Russie en rapport avec la guerre en Ukraine, comprenant notamment un embargo partiel sur les importations de pétrole russe par voie maritime. Prague, Budapest et Bratislava, très dépendants de Moscou en produits énergétiques, ont obtenu de Bruxelles une dérogation de 18 mois avant de s’aligner sur la décision européenne.
L’accord, scellé par les 27 États membres après de dures négociations, prévoit l’arrêt progressif des importations qui arrivent par voie maritime, soit les deux tiers des achats, auxquels s’ajoute le projet de l’Allemagne et de la Pologne de cesser leur approvisionnement terrestre d’ici début 2023.
Justifiant la décision de Prague d’importer du pétrole russe, le Premier ministre tchèque, Petr Fiala, dont le pays assure la présidence tournante du Conseil de l’UE, depuis le 1-er juillet dernier, a affirmé que son gouvernement ‘’soutient pleinement l’arrêt des importations du pétrole russe par voie maritime’’, notant toutefois que la Tchéquie, tout comme la Hongrie et la Slovaquie, ont besoin d’un peu de temps pour se joindre totalement à l’embargo.
Fiala, cité par des journaux locaux, a précisé que le délai de 18 mois ’’permettra de continuer à importer des produits fabriqués à partir de pétrole russe dans les trois pays’’.
Selon lui, le gouvernement tchèque œuvre pour l’augmentation des capacités des oléoducs pouvant acheminer du pétrole vers la République tchèque, le pays disposant actuellement de réserves pour 90 jours. Près de 50 pc du pétrole acheminé en Tchéquie provenant d’autres pays que la Russie, Prague entend surtout augmenter les livraisons par l’oléoduc Transalpin (TAL) qui relie l’Italie, l’Autriche et l’Allemagne, a-t-il souligné.
La République tchèque s’est tournée vers la construction d’une nouvelle unité dans la centrale nucléaire à Dukovany (près de la frontière avec la Slovénie et l’Autriche) pour réduire sa dépendance énergétique russe.
Selon le FMI, les trois États sont particulièrement dépendants de la Russie en énergie (pétrole et gaz) et risquent, en cas de coupure brusque, des pénuries pouvant atteindre 40pc de la consommation de gaz, ce qui se traduirait par une chute de 6pc du PIB.