La Libye au bord de la « guerre civile »

Alors que l’ONG Human Rights Watch évoque un bilan de 233 morts en Libye, le régime de Mouammar Kadhafi a enfin réagi dimanche soir. Lors d’une allocution télévisée, l’un des fils du colonel, Seïf Al-Islam, a reconnu un risque de « guerre civile ».

Coincée entre la Tunisie et l’Egypte, entre la Méditerranée et un Tchad divisé par des conflits civils successifs, la Libye devait bien finir par être touchée par un mouvement de contestation. Sourd en début de semaine dernière, il a rapidement pris une ampleur démesurée, notamment à Benghazi et Al-Baïda, respectivement deuxième et troisième plus grandes villes du pays. Dimanche soir, l’organisation de défense des Droits de l’homme Human Rights Watch (HRW), s’appuyant sur des sources hospitalières, faisait état d’un bilan de 173 morts. Lundi matin, l’ONG a actualisé son bilan à 233 tués depuis le 17 février.

La publication de ce seul chiffre a décidé le pouvoir de sortir du silence. Le colonel Mouammar Kadhafi, au pouvoir depuis le 1er septembre 1969, a envoyé à la télévision l’un de ses fils, Seïf Al-Islam. Ce dernier, lors d’une allocution retransmise dimanche soir sur toutes les chaînes d’informations en continu, a affirmé que le peuple devait choisir entre "construire une nouvelle Libye" –mais toujours pilotée par Kadhafi– ou "plonger dans la guerre civile". Le régime en place ne veut donc rien lâcher sans toutefois fermer la porte à d’éventuelles réformes.

Tripoli gagnée par la révolte

Un discours qui n’a pas fait son effet dans l’immédiat. Les affrontements ont en effet gagné la capitale, Tripoli, dimanche soir. A peine une heure après l’intervention de Seïf Al-Islam, des tirs nourris ont été entendus en pleine ville. Selon des habitants, interrogés par i-Télé et France Info, des "mercenaires" auraient été engagés et "tueraient tout manifestant" au côté de "l’armée". Selon d’autres témoignages, relayés par les agences de presse, des voitures et tas de pneus ont été brûlées dans plusieurs quartiers de la capitale.

Une psychose utilisée par le fils de Kadhafi, dont le discours était construit selon la théorie du complot. Seïf Al-Islam, qui conduisait le courant réformateur depuis 2007 avant d’annoncer sa retraite politique un an après, a affirmé que la Libye était la cible d’un complot étranger. Il a mis en garde les occidentaux contre l’arrêt des contrats portant sur le pétrole ou le gaz. Il a également menacé l’Union européenne de cesser toute coopération en matière de lutte contre l’immigration illégale. Le pays est un point de passage privilégié de réseaux d’immigrants clandestins venus d’Afrique, du fait de ses 2.000 kilomètres de côtes et des 4.000 km de frontières qu’il partage avec ses six voisins africains.

Reste que la crise gagne le régime même. Le représentant permanent de la Libye auprès de la Ligue arabe, Abdel Moneim al-Honi, a annoncé dimanche soir au Caire qu’il démissionnait de son poste pour rejoindre "la révolution" et protester contre la "violence contre les manifestants" dans son pays. Le début de la fin?

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