Indignation au Maroc après la condamnation des meneurs du « Hirak »

La condamnation à de lourdes peines de prison des meneurs du mouvement de protestation « Hirak », a suscité des réactions de colère et d’indignation dans le royaume.

Les meneurs du "Hirak" ont été condamnés mardi soir à Casablanca à des peines allant jusqu’à 20 ans de prison, à l’issue d’un procès-fleuve de neuf mois.

Le leader du mouvement, Nasser Zefzafi, ainsi que trois autres meneurs, Nabil Ahmjiq, Ouassim Boustati et Samir Ighid, ont écopé de la peine la plus lourde pour "complot visant à porter atteinte à la sécurité de l’Etat", un chef d’accusation passible selon les textes de la peine de mort.

Les 49 autres militants qui comparaissaient ont écopé de peines comprises entre un an et 15 ans de prison.

Les avocats de la défense ont refusé de plaider par solidarité avec les prévenus, qui ont boycotté les dernières audiences pour dénoncer la "partialité de la justice".

"Les décisions désastreuses de l’Etat menacent la stabilité et la cohésion du pays", a fustigé Nabila Mounib, figure de la gauche au Maroc à la tête du PSU (Parti socialiste unifié), lors d’une conférence consacrée à la contestation sociale dans le pays et aux détentions politiques, mercredi à Casablanca.

Dans la nuit de mardi à mercredi, des rassemblements ont eu lieu à Al-Hoceïma (nord) et dans la ville voisine d’Imzouren, autre haut lieu de la protestation, où un collège a été incendié, selon des médias locaux.

Les autorités locales ont confirmé à l’AFP qu’un collège avait brûlé dans la nuit, en indiquant "ne pouvoir se prononcer sur le lien entre l’incendie et les sentences". Une enquête a été ouverte pour déterminer les causes de l’incendie.

Pour les autorités locales, les manifestations se limitent à des "sorties isolées", à l’exception d’un rassemblement de "moins de 80 personnes à Al-Hoceima", réunissant la famille d’un détenu et ses voisins.

"L’affaire sera bien entendu réexaminée devant la Cour d’appel (…). J’ai espoir que les peines prononcées seront plus justes", a dit au site d’information Goud le ministre d’Etat chargé des droits de l’Homme, Mustapha Ramid.

Les manifestations dans le Rif avaient été déclenchées par la mort accidentelle en octobre 2016 d’un vendeur de poissons, broyé dans une benne à ordures.

Au total, 53 personnes comparaissaient lors de ce procès. La peine la moins lourde se limite à un an de prison, couvrant la détention préventive, et 5.000 dirhams (environ 450 euros) d’amende, selon le verdict prononcé par la chambre criminelle de la cour d’appel de Casablanca en l’absence des accusés.

Trois d’entre eux, Mohamed Haki, Zakaria Adehchour et Mahmoud Bouhenoud ont été condamnés à 15 ans de prison, sept à 10 ans de prison, également pour "complot visant à porter atteinte à la sécurité de l’Etat".

Sous le choc, des proches des accusés, présents dans la salle d’audience, ont poussé des cris de détresse quand les peines les plus lourdes ont été prononcées. Quelques rares militants ont scandé des slogans de solidarité, comme "vive le Rif" ou "Nous sommes Zefzafi".

"Ce sont des peines très lourdes. L’Etat a échoué dans ce test de respect des droits de l’homme et des libertés essentielles, tout comme l’indépendance de la justice", a déclaré à l’AFP l’un des avocats de la défense, Souad Brahma.

"Les peines sont très légères par rapport à ce que prévoit la loi et à la façon dont ils se sont comportés devant le juge", a commenté pour sa part Mohamed Karout, l’un des avocats des parties civiles qui représentaient l’Etat et ses agents.

Dix accusés ont par ailleurs été condamnés à 5 ans de prison et 2000 dh (180 euros) d’amende, huit à 3 ans et 1000 dh amende (90 euros), et 21 à deux ans et 5000 dh (450 euros). Les peines de 5 ans de prison et moins correspondent à des chefs d’accusation comme "participation à une manifestation non autorisée" ou "insulte envers les forces de l’ordre".

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