Trabelsi, beau-frère de Ben Ali, remis en liberté en France sous contrôle judiciaire

Belhassen Trabelsi, beau-frère de l’ancien dictateur tunisien Zine el Abidine Ben Ali, en détention provisoire à Marseille depuis dix jours après son inculpation pour « blanchiment en bande organisée » par la justice française, a obtenu jeudi sa remise en liberté sous contrôle judiciaire.

La cour d’appel d’Aix-en-Provence (sud-est) est allée à l’encontre du parquet, et a conditionné sa remise en liberté au versement d’une caution de 100.000 euros. Le contrôle judiciaire prévoit une obligation de résider en France, de ne pas quitter le territoire national et de pointer une fois par semaine dans un commissariat de son lieu de résidence.

Il lui est également interdit de rencontrer les autres personnes mises en examen (inculpées) dans cette affaire.

"Je me conformerai à toutes les dispositions qui seront prises. Donnez-moi ma chance de prouver que je ne suis pas un fugitif, mais un homme normal, respectueux de ses engagements", a déclaré à l’audience Belhassen Trabelsi, 56 ans, dont la Tunisie a demandé l’extradition pour son implication dans diverses affaires de corruption. Il y a été condamné par défaut à quinze ans de prison.

Son avocat, Me Xavier Nogueras, a précisé à l’AFP que son client retournait jeudi à la prison des Baumettes à Marseille dans l’attente de la notification de l’arrêt de remise en liberté de la chambre de l’instruction et du versement de la caution.

En cavale depuis mai 2016 après avoir quitté le Canada où il s’était réfugié après la révolution tunisienne de janvier 2011, le frère de l’ex-première dame tunisienne Leila Trabelsi a été arrêté mi-mars dans le sud de la France et mis en examen pour "blanchiment en bande organisée, recel, usage et complicité de faux documents administratifs ainsi que pour entrée irrégulière d’un étranger sur le territoire national". Sa défense avait fait appel contre son placement en détention provisoire.

A l’audience jeudi, le parquet général de la cour d’appel s’est prononcé contre cette demande de remise en liberté. "La détention s’impose pour conserver les preuves et indices matériels. Une remise en liberté pourrait rendre plus difficiles les investigations en cours", a estimé l’avocat général Laurent Robert, évoquant "une forme de clandestinité" dans laquelle vivait M. Trabelsi. "Il ne resterait pas en France" s’il était remis en liberté, a-t-il ajouté.

M. Trabelsi a été interpellé dans le cadre d’une enquête menée par la Juridiction interrégionale spécialisée (Jirs) de Marseille. Un juge d’instruction marseillais cherche à détailler les circuits financiers de fonds qui auraient transité par des sociétés offshore aux Iles Marshall et par une banque monégasque afin que M. Trabelsi acquière en 2017 via un intermédiaire un bien immobilier à Villeneuve-Loubet, sur la Côte d’Azur, pour 1,5 million d’euros, a précisé un juge lors de l’audience.

La justice s’intéresse également à une fausse transaction établie pour justifier l’origine légale des fonds.

Sous le régime de Zine el Abidine Ben Ali (1987-2011), sa famille et son épouse Leila Trabelsi ont mis la Tunisie en coupe réglée, faisant main basse sur des pans entiers de l’économie. Homme d’affaires alors incontournable, M. Trabelsi fait l’objet de "17 mandats de recherche en Tunisie et de 43 mandats d’amener internationaux", selon le ministère tunisien de la Justice.

Qualifié de "quasi-mafieux" dans une dépêche diplomatique américaine de 2008, Belhassen Trabelsi avait trouvé refuge au Canada quelques heures à peine avant la chute de Ben Ali, le 14 janvier 2011, après avoir fui avec sa famille à bord de son yacht.

En mai 2012, après avoir perdu son statut de résident permanent au Canada, M. Trabelsi y avait demandé l’asile politique, disant craindre pour sa vie en Tunisie, mais il avait été débouté et était sur le point d’être expulsé lorsque Ottawa avait définitivement perdu sa trace, début juin 2016.

Depuis son départ du Canada, M. Trabelsi vivait en France sous une fausse identité avec un passeport irlandais et un permis de conduire texan. C’est d’ailleurs dans le cadre d’une enquête portant sur les activités d’un faussaire que les faits visant M. Trabelsi ont été mis au jour, a encore précisé le juge à l’audience jeudi.

Ce faussaire aux tarifs prohibitifs – 60.000 euros pour un faux document – lui avait été conseillé par l’ex-président Ben Ali, réfugié en Arabie saoudite. M. Trabelsi a avoué l’usage de ces faux documents.

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