Présentation à Rabat de l’ouvrage « Vécu frontalier algéro-marocain depuis 1994. Quotidien d’une population séparée »

L’ouvrage « Vécu frontalier algéro-marocain depuis 1994. Quotidien d’une population séparée » qui relate les multiples facettes du quotidien de la population de la région d’Oujda et de l’Oranie, a été présenté lundi soir à la Bibliothèque nationale du Royaume à Rabat, en présence d’éminentes personnalités.

Edité par l’"Harmattan", le livre de Fatiha Daoudi est le fruit d’une observation participative de la région qui a un genre de vie particulier dans la mesure où la population frontalière a presque de tout temps entretenu des relations familiales et commerciales soutenues, son vécu est basé sur une forte proximité de part et d’autre de la frontière. Ainsi, la fermeture des frontières par Alger n’est pas respectée par cette population, au quotidien. Son unique résultat est l’apparition et l’installation d’une sorte de "déviance routinière" sous forme de trafics des biens et des personnes.

Présentant son livre, Fatiha Daoudi a souligné que "la décision du gouvernement algérien de garder ses frontières terrestres avec le Maroc fermées depuis 1994 a conduit à la transgression quotidienne de cette fermeture par la population, donnant lieu à une situation de "déviance" (comportements non conformes à la norme) manifeste dans la région, aggravée par la durée de la fermeture (Vingt et un ans)".

Fatiha Daoudi, elle-même originaire de cette zone frontalière, a expliqué avoir opté pour l’observation participante à travers l’accompagnement des témoins pour vivre avec eux leur quotidien, les entretiens informels sans questionnaires préétablis, le recueil des témoignages écrits et des récits, le vécu d’une traversée clandestine et les questions modelées selon les cibles et les circonstances.

Dans ce cadre, elle a fait observer que le travail de terrain du côté algérien était délicat et restreint à cause de la position officielle algérienne, citant dans ce sens la difficulté d’approcher les témoins (approche possible grâce à des relations familiales) et l’impossibilité de contacter des institutionnels en lien avec les frontières. En revanche son travail de terrain au Maroc était aisé et diversifié (différents témoins, représentants d’institutions, de la société civile et élus).

Le livre relève l’inadéquation de la décision de la fermeture des frontières avec l’agencement du vécu frontalier d’autant plus que la population frontalière algéro-marocaine ne peut être assimilée au reste de la population des deux pays.

Livrant une lecture de cet ouvrage, le professeur Moulay Ismaïl Alaoui, ancien ministre de l’Education nationale puis de l’Agriculture a souligné que le livre est un travail extrêmement "intéressant" et "attirant", notant que Fatiha Daoudi, juriste de formation, a fait plus un travail de sociologue, de politologue et d’anthropologue.

L’ouvrage est un florilège d’émotion ressentie et retransmise de manière scrupuleuse auprès des personnes interviewées, a-t-il dit, invitant le lecteur à lire et méditer le livre qui décortique la situation des population des zones frontalières. Abordant la problématique évoquée par le livre à savoir "la fermeture des frontières", M. Alaoui a relevé que depuis 1962 l’ouverture des frontières entre les deux pays est une exception tandis que la fermeture est la règle, notant que c’est un état de fait qui perdure avec de temps en temps des éclaircissements. Cette situation complique la vie aux habitations des zones frontalières qui ont des liens familiaux de part et d’autres. Ainsi, au lieu de quelques kilomètres pour passer de l’autre côté des frontières, les habitants sont obligés de faire un long voyage par avion, qui n’est pas à la portée de tout le monde. Docteure en science politique, diplômée de l’Université de Grenoble Alpes, Fatiha Daoudi a orienté ses recherches sur le vécu des populations des frontières algéro-marocaines depuis leur fermeture en 1994. Elle est également militante des droits humains, membre de plusieurs associations et experte en genre et en droits humains auprès d’organismes internationaux.

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