Narjiss Nejjar: « Opposer la culture à l’obscurantisme »

A peine nommée directrice de la cinémathèque marocaine, Narjiss Nejjar s’est mise au travail. Le chantier est immense d’autant que cette réalisatrice a l’ambition d’en faire « la Cinémathèque référence sur le continent Africain ». Plus question, dit-elle, d’être considérés comme « un tiers-monde intellectuel »

Propos recueillis par Narjis Rerhaye (A Rabat)

Atlasinfo : Une cinéaste telle que vous à la tête de la cinémathèque marocaine, faut-il être surpris de votre nomination? Et comment l’avez-vous accueillie?

Narjiss Nejjar : Les cinémathèques à travers le monde sont toujours nées sous l’impulsion de cinéastes. Et le Maroc n’échappe pas à la règle, Souhail Benbarka en a bâti les murs il y a plus de vingt ans, il faut désormais du contenu et je compte bien m ‘y atteler. Ceci étant dit, ce projet est une collaboration de tous les instants avec M. Sarim Fassi-Fihri, à qui j’ai proposé une vision pointue et une ligne éditoriale bien définie. Et je peux vous garantir que nous mettons le coeur à l’ouvrage. Donc non cette nomination n ‘est pas une surprise, c’est un travail qui se fait en amont depuis de nombreux mois

Presque personne ne connait la cinémathèque marocaine. C’est un travail de construction qui vous attend. Comment comptez-vous vous y prendre?

C’est un chantier titanesque, mais cela ne me fait pas peur. Nous allons commencer par réhabiliter le bâtiment qui accueille la cinémathèque, lui conférer un habillage et une esthétique. En parallèle nous prenons attache avec toutes les institutions garantes de la mémoire du cinéma à travers le monde. J’ai eu la chance de cultiver ces liens précieux que je mets désormais au service de mon pays.

De quelle cinémathèque rêvez-vous? Et quelles seront vos priorités?

Je rêve d’une cinémathèque qui deviendrait avec le temps une fondation d’utilité publique et qui prendrait ses quartiers dans un bâtiment du patrimoine. Je souhaite que nous devenions La Cinémathèque référence sur le continent Africain et je mettrai tout en oeuvre pour que nous cessions d’être considérés comme un tiers-monde intellectuel. Nous avons des penseurs, des chercheurs, des artistes de renom, un terreau de talents parmi notre jeunesse aussi, une jeunesse qui est avide mais que l’on ne considère pas assez. Mon axe prioritaire est d’ailleurs l’éducation par l’image. Je veux inviter le monde sur nos écrans et je veux que l’on s’invite sur les écrans du monde. je cite pour conclure saint-exupery " Ce qui sauve c’est de faire un pas, et encore un pas…". Je crois avec force conviction aux potentialités de notre pays. Sa majesté a déclaré Rabat capitale des lumières et nulle lumière sans Arts. Alors au travail!

Vous arrivez de Berlin où votre dernier film "Apatride" a fait forte impression. Vous êtes désormais à la tête de la cinémathèque. Que faut-il vous souhaiter encore?

Souhaitez-moi que ce rêve ne soit pas uniquement le mien et pour cela il faut une prise de conscience des instances gouvernementales. Il faut opposer la culture à l’obscurantisme. C’est notre seule planche de salut.

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Ce site Web utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que vous êtes d'accord avec cela, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. J'accepte Lire la suite